Sous la lune du Sureau : à la rencontre de Frau Holle

Pour mes recherches de la lune liée au Sureau dans la tradition Faerie Faith, je me suis intéressée à Frau Holle.

En réalité, c’est une figure qui me suit depuis de nombreuses années et avec laquelle j’ai tissé des liens dès mes tout débuts au sein de cette tradition. Si cela est possible, j’aimerais les approfondir encore davantage tout au long de cette nouvelle année sorcière. Bien que je n’aurai sans doute pas autant de temps à lui consacrer que je le voudrais, j’essaierai d’être régulière malgré tout.

Voici un aperçu très rapide qui vous donnera peut-être envie d’en savoir plus sur Dame Holle et aller à sa rencontre.  J’essaierai de faire un ou deux autres articles rapides sur Dame Holle, notamment sur le sureau noir.

Car il est impossible de parler de Frau Holle sans le mentionner ! Le sureau est la plante qui lui est le plus intimement liée.

Fleur de Sureau, Ruis 2025.

Illustration : « Frau Holle » Mixed media Illustrations by Catrin Welz-Stein.

Frau Holle

Vous connaissez sans doute le personnage de conte repris par les frères Grimm. Frau Holle est aussi une figure du folklore germanique et une ancienne divinité préchrétienne.
Les récits traditionnels lui attribuent des aspects à la fois bienveillants et sévères : elle récompense les personnes travailleuses, punit les paresseuses et entretient un lien symbolique avec les phénomènes naturels, comme la neige qu’elle fait tomber en secouant ses oreillers. Dans plusieurs études mythologiques, elle apparaît comme une figure ambivalente, présente aussi bien dans le monde d’en haut que dans le monde d’en bas, associée à la fois aux vivants et aux morts. Cette dualité en fait une figure singulière dans l’imaginaire germanique, où les limites entre vie et au-delà semblent plus perméables.

Le nom Holle vient des racines ouest-germaniques (hold, holda, holde), attestées en vieux et moyen haut allemand, et non de la mythologie scandinave. L’appellation Mother Hulda, Mère Hulda, est une traduction ou adaptation anglaise qui peut créer une confusion : Hulda évoque clairement la Scandinavie ou la figure biblique, alors que Holle reste propre au folklore allemand.

Holle n’est donc pas issue du panthéon nordique, mais bien du panthéon germanique.

Les noms de la Déesse

Etudiée au XIXᵉ siècle par Jacob Grimm et par d’autres chercheurs tels que Karl Paetow, Wilhelm Mannhardt et Johann Wilhelm Wolf. Elle apparaît sous de nombreux noms dans les régions germanophones et est souvent associée à Wodan, le père des dieux, tandis que Perchta, figure proche, est liée aux coutumes du Nouvel An.

Le christianisme a influencé la perception de ces croyances, et les interprétations divergentes des chercheurs rendent l’identité de Frau Holle complexe et incertaine.

Thème Informations essentielles
Origine linguistique & sens ancien
    • Issu de l’adjectif germanique hold (OHG/MHG) : « bienveillant, fidèle, miséricordieux ».
    • Holda/holde désigne un esprit féminin bénéfique ou servante loyale.
Folklore & usage populaire
    • Frau Holle secoue ses oreillers → il neige.
    • Dans les contes Grimm, elle est gardienne du foyer, récompense les travailleuses et punit les paresseuses.
    • Aujourd’hui, l’expression est utilisée pour dire « il neige ».
Étymologies néerlandaises & bibliques
    • Nom lié à huld/hold = « loyal ».
    • Également associé à la prophétesse biblique Hulda.
Lien nordique/danois
    • Hulda rapprochée de huldre, terme lié aux elfes.
Recherches savantes
    • Jacob Grimm : hulþô (fém.), hulþα (masc.) vs unhulþ (« démon ») → possible caractère hermaphrodite.
    • Burchard von Worms : Holda latinisé, déesse païenne.
    • August Schrade : rapproche Holle de Frigga, Erda, Hludana, Perahta, etc.
    • Laurentius Knappert  : Hludana = déesse de la terre.
    • Wolfgang Golther : Holle = Hludana = Hlodyn → déesse liée à la terre ou au feu du foyer.
    • Paul Hermann : Holle ≈ Frija, épouse de Wodan. Racine prija épouse, aimée »). Lien avec le vendredi (Freitag/Friday), jour consacré à Frija/Frigg.

Certains auteurs ont tenté de l’associer à Freya, mais cette identification reste contestée. La plupart distinguent en effet Freya, sœur de Freyr, de Frija/Frigg, l’épouse de Wodan.

Perchta et les figures associées

Perchta est une figure complexe, à la fois variante régionale de Frau Holle et personnage autonome. Elle incarne la fertilité, la surveillance des travaux domestiques et les rites hivernaux, tout en ayant été transformée par le christianisme en une figure ambivalente, mêlant bienveillance et menace.

Les chercheurs divergent sur son origine : s’agit-il d’une déesse germanique ancienne ou d’une création médiévale liée à l’Épiphanie.

Ses traits communs avec Holle :

    • Toutes deux sont liées au filage, aux récompenses et punitions, à la fertilité des champs, aux processions hivernales et à la chasse sauvage.
    • Leur image oscille entre bienveillance (apporte la prospérité, gardienne des enfants) et menace (punitions, aspect terrifiant).
    • Le christianisme a contribué à leur démonisation, transformant des divinités païennes en figures de superstition.

Christianisation, de Frau Holle et Perchta à la vierge Marie

Les figures païennes de Frau Holle et de Perchta, très présentes dans les traditions d’Europe centrale, ont résisté à la christianisation et se sont peu à peu fondues dans l’univers chrétien. Dès le XIIIᵉ siècle, l’Église se plaint que les jeunes prient davantage Perchta que la Vierge Marie, et jusqu’au XVe siècle elle menace de sanctions ceux qui continuent à déposer nourriture et boisson pour la déesse du solstice. Des témoignages montrent que certains affirmaient voyager avec Holle lors de la Chasse sauvage ou pénétrer dans sa montagne sacrée.

Pour contrer ces pratiques, l’Église tente de récupérer et transformer ces figures. C’est ainsi qu’apparaît la sainte Hulda (Sainte-Hoïlde) de Troyes, patronne des eaux, dont la fête tombe à Walpurgis.

Jacob Grimm, au XIXᵉ siècle, souligne la profondeur des racines linguistiques et mythologiques de Holle et Perchta, et leur lien avec les fêtes de Noël et du Nouvel An. Il observe aussi que plusieurs traits de ces déesses ont été transférés à Marie, notamment dans les coutumes du samedi, appelé parfois « jour de Frau Holle », ou dans les légendes liées aux puits et aux enfants.

Au XIXe, certains voient en Holle une survivance païenne absorbée par le christianisme, tandis que d’autres, pensent au contraire que Holle n’est qu’une imitation des récits mariaux. Les exemples abondent de syncrétisme :

    • puits sacrés transformés en chapelles dédiées à Marie,
    • légendes autour de la neige attribuées tantôt à Hilde, tantôt à la Vierge,
    • récits d’enfants nourris et protégés par une femme bienveillante dans des mondes souterrains.

Une confrontation prolongée, suivie d’une fusion progressive, s’est donc opérée entre les cultes populaires de Holle et de Perchta et la figure chrétienne de la Vierge Marie, illustrant la manière dont les traditions païennes ont été absorbées, transformées ou réinterprétées au fil des siècles.

De la vision romantique aux perspectives modernes

Frau Holle apparaît sous une grande variété de noms (Holle, Holda, Hulda, Perchta, Frigg, Frija, Freya, Nerthus, etc.), témoignant de traditions régionales et temporelles diverses.

Assimilations simplificatrices du XIXᵉ siècle

Les chercheurs romantiques du XIXe siècle considéraient les tribus germaniques comme un seul peuple avec une religion commune. Ils utilisaient les sources nordiques (vikings) pour interpréter l’ensemble du monde germanique, ce qui menait à des assimilations simplificatrices (par ex. Holle comme épouse de Wodan).

Critiques et apports des recherches récentes (Motz, Schmidt, Wilson)

La recherche moderne (histoire, archéologie, linguistique, philologie) montrent que le terme « germanique » désigne un ensemble de peuples distincts partageant seulement certaines caractéristiques linguistiques et ethniques minimales.

L’utilisation des sources nordiques anciennes pour expliquer les croyances anglo-saxonnes, comme le critiquait le cherche britannique David Wilson, est désormais considérée comme erronée, car elle ignore les différences de temps et de contexte.

Lien possible avec Nerthus et influences celtiques

La philologue américano-autrichienne Lotte Motz propose que la déesse terrestre Holle pourrait dériver de Nerthus, décrite par Tacite, mais Holle s’est transformée au fil du temps et a pu intégrer des aspects des déesses vikings Frigg et Jord.

Les liens supposés entre Holle et la déesse viking Hel sont rejetés : les termes associés à Holle renvoient à la lumière et non à l’au-delà.

Mais l’idée que Holle serait l’épouse de Wodan, avancée par des chercheurs du XIXᵉ siècle, n’a aucun fondement scientifique.

Enfin, Holle pourrait également présenter des traits celtiques, car les Germains ont assimilé certains éléments de la culture celtique, comme le souligne Michael Schmidt (1999).

Malgré les avancées scientifiques, les anciennes interprétations restent populaires hors du milieu académique, faute d’une bonne diffusion et accessibilité aux recherches récentes. De plus, la disparition progressive du folklore vivant (après la Seconde Guerre mondiale, migrations, médias modernes) a contribué à réduire l’intérêt populaire.

En résumé, les recherches récentes déconstruisent la vision romantique d’une religion germanique uniforme. Holle est désormais comprise comme une figure complexe, issue de traditions variées, probablement liée à Nerthus, une déesse terrestre et lumineuse, et transformée au fil des siècles, avec des influences nordiques et peut-être celtiques.

Sources :

  • GardenStone. (2011). Goddess Holle: In search of a Germanic goddess. Mother Hulda in fairy tales, sagas, legends, poetry, tradition and mythology (M. L. M. Hitchcock, Trans.). Books on Demand.
  • https://www.etymonline.com/word/hold
  • https://en.wikipedia.org/wiki/Hludana
  • https://fr.wikipedia.org/wiki/Dame_Holle
  • https://en.wikipedia.org/wiki/Frau_Holle
  • https://www.grimmstories.com/fr/grimm_contes/dame_hiver_dame_holle
  • https://grimm-reecritures.msh.uca.fr/frau-holle-das-marchen-von-goldmarie-und-pechmarie

Ceridwen, magicienne, devineresse & sorcière

Je ne sais plus si je l’ai déjà évoqué ici, mais au pire je me répéterai. C’est l’âge qui me fait radoter ;o). Au solstice d’été, j’ai choisi de reprendre à zéro mon cheminement au sein de la tradition Faerie Faith. Me voici donc à nouveau étudiante : je suis le programme d’enseignements et, parallèlement, j’effectue des recherches à chaque lunaison sur différents thèmes. En réalité, c’est une pratique que nous poursuivons année après année, pour une raison particulière.

Pour ce mois lunaire, j’ai envie de partager un extrait de mon compte-rendu qui est consacré à la divinité ou figure archétypale de la lunaison. Cette fois-ci, il s’agit de Ceridwen. J’ai particulièrement apprécié de faire des liens entre ce que j’ai appris au cours de mon cursus de ces dernières semaines et mes recherches sur elle : cela ouvre une compréhension plus profonde et vivante !

Fleur de Sureau.

Illustration : « Ceridwen: The Welsh Enchantress of Inspiration, Knowledge, and Transformation » par anetteprs 

Ceridwen : magicienne, devineresse & sorcière

Ceridwen est une figure féminine majeure de la tradition galloise. Elle est décrite comme une experte et savante : en magie, en divination et en sorcellerie. Elle réside au bord du lac Bala aux côtés de son époux Tegid Foel. Ses enfants sont Morfran, associé à la laideur, et Creirwy, symbole de beauté.

Sa légende est celle du chaudron, dont le breuvage magique devait conférer l’inspiration prophétique et la sagesse à Morvran. Lors de sa préparation, elle demande de l’aide à Gwion Bach. C’est ce dernier qui absorbe les 3 gouttes magiques, par ruse. Gwion s’enfuit devant la fureur de Ceridwen, bien décidée à le tuer. Après une suite de transformations et de poursuites, elle finit par le dévorer. Neuf mois plus tard, elle met au monde Taliesin, futur grand barde.

Ceridwen est une figure des forces de renaissance, de transformation et d’inspiration, reliant la magie du chaudron à la métamorphose spirituelle.

Ceridwen, ses noms et variantes

Le nom Ceridwen, parfois appelée Cyrridfen. apparaît sous de nombreuses formes dans les manuscrits médiévaux gallois (Kyrridven, Cerituen, Kerrituen, Kerituen, etc.).

  • La terminaison en fen (issue de ben = « femme ») est la plus fréquente.
  • Le double rr est courant dans les formes anciennes, alors que l’usage moderne préfère un seul r.
  • Les différences entre C et K relèvent surtout de conventions d’écriture pour le son dur /k/.

Évolution historique :

  • Les premières attestations datent du XIIIᵉ siècle (Livre noir de Carmarthen, Livre de Taliesin, Livre rouge de Hergest).
  • Plus tard, au XVIᵉ siècle, Elis Gruffydd utilise Ceridwen ou Caridwen dans le récit de Gwion Bach devenu Taliesin.
  • Charlotte Guest popularise la forme Caridwen dans sa traduction du Mabinogion.

Sens *possibles* du nom :

Selon Marged Haycock :

  • Dérivé de cwrr (« courbé, anguleux ») → « femme au dos voûté », stéréotype de sorcière (proposition ancienne, notamment défendue par Ifor Williams).
  • De cyr (lié à crynu, « trembler ») → figure qui fait frissonner.
  • De crid/craid → « passionnée, puissante ».
  • De ŷd (« blé, grain ») → déesse du blé, analogue à Cérès.
  • Par analogie avec sa fille Creirwy (« croyance ») → Credidfen, « femme digne de foi ».

La Blanche-Aimée

D’après Philippe Jouët et A. J. Raude, Ceridwen, en vieux-celtique *Karito-winda, signifie « Blanche-Aimée ». De *karita = aimée.

Contexte mythologique

Famille

Tegid Voel

Son époux est le géant Tegid Voel (ou Foel). Son surnom signifie « le Chauve » ou « taciturne chauve ». Il est présenté dans l’Histoire de Taliesin comme l’époux de Ceridwen et le père de Morfran (Avangddu) et de Creirwy. Ses terres se trouvent près d’un lac, souvent identifié au Llyn Tegid (lac Bala).

Son nom porte une double résonance :

    • La calvitie (« Voel » = chauve), qui peut suggérer une figure dépouillée, nue de tout ornement.
    • Le silence (rappel du latin tacitus, « qui garde le silence » ou « dont on ne parle pas »), ce qui l’associe à une présence discrète, effacée, presque invisible dans le récit.

Ce sont deux qualités négatives de l’Autre Monde nocturne.

Dans l’histoire de Taliesin, Tegid apparaît comme un personnage secondaire mais symboliquement marqué : un homme silencieux, effacé, dont l’identité se définit par son absence de parole et par son lien au lac, tandis que c’est Ceridwen qui agit et rayonne dans l’histoire. Cela pourrait évoquer la nuit et la lune. Ensemble, ils ont deux enfants : un fils, Morfran, et une fille, Creirwy.

Morvran eil Tegid

Morvran (ou Morfran) est aussi surnommé Afangddu ou Avangddu à cause de sa couleur sombre. Décrit comme « très horrible de forme, d’aspect et de comportement », il incarne une figure repoussante. Dans son dictionnaire, Phillipe Jouët précise Afangddu (Y Vagddu), qui signifie littéralement « monstre noir aquatique ». Attesté en vieux breton sous les formes abac-, amachdu (roche marine). Lié au mot avank (« castor » en breton) et abac en irlandais.

    • Son rôle dans la légende : Morfran espérait recevoir le breuvage de sagesse et de poésie préparé par sa mère Ceridwen. Mais il est évincé par Gwion Bach, qui goûte à la préparation et devient Taliesin.
    • Symbolisme : Morfran/Afangddu représente le mauvais compétiteur, celui qui ne peut accéder au « Feu des eaux » (la puissance inspiratrice du chaudron). Il incarne l’échec, l’exclusion, incapable d’accéder à la lumière poétique, et la part sombre de l’héritage de Ceridwen.

Creirwy

Creirwy, variantes Crairw et Creirfyw, aussi appelée Llywy, passe pour être la plus belle fille de son temps. Dans les triades galloises, elle figure parmi les trois Belles-Jeunes-Filles (Gwenriein) de l’Île de Bretagne. Elle fut aimée de Garwy Hir. Selon Markale et Persigoult, son nom signifierait : « le joyau ». Selon Marged Haycock, comme on l’a vu plus haut, « croyance ». Mais selon I. Williams, plus vraisemblablement, son nom signifierait « Vivante-Aimée ».

Gwion Bach / Taliesin

Je le place ici puisque Ceridwen est somme toute la mère du poète Taliesin !

Le nom Gwion peut être compris à partir d’une ancienne racine indo-européenne. Le linguiste E. Hamp le rattache à la racine *weys- qui signifie « couler », utilisée pour parler des eaux fluviales. À partir de cette racine, il propose une forme reconstruite *uis-onos avec le suffixe de sublimation *-on-os qui sert à créer une idée de substance ou d’essence.

Ainsi, Gwion pourrait se traduire par quelque chose comme :

      • « Le petit poison/breuvage archétypal  ».

Cette image repose sur une tradition ancienne : le verbe poétique, en particulier celui de la satire, est comme un fluide virulent. On retrouve cette idée dans le poème Prif Cyfarch du Book of Taliesin, où le barde affirme que son verbe agit comme une force brûlante, comparable au le feu de la parole :

« Je suis ancien, je suis nouveau, je suis Gwion… ivresse des ivres… expert en joutes »

« Wyf hen wyf newid wyf gwion… medut medwon… Wyf syw amrysson. »

Le récit fondamental : Ceridwen, Gwion Bach et la naissance de Taliesin

  • L’acte magique : Puissante en magie, sorcellerie et divination, elle prépare pendant un an et un jour une boisson faite d’herbes choisies, destinée à donner le don de prophétie à son fils, Morfan.
  • L’accident : Mais c’est Gwion Bach qui, par ruse, ingère trois gouttes magiques de ce breuvage.
  • La poursuite et les métamorphoses : Ceridwen le poursuit alors à travers plusieurs métamorphoses animales dans les 3 espaces : la terre, la mer et le ciel.
  • La renaissance : Elle finit par l’avaler sous la forme d’un grain de blé, puis met au monde 9 mois plus tard Taliesin. Elle l’abandonne ensuite aux flots, qui le conduiront quarante ans plus tard dans la pêcherie de Gwyddno.

Symbolisme de Ceridwen

La nuit, l’obscur et la lune

Ceridwen est associée à la nuit, à ses puissances cachées, et ainsi, probablement à la Lune.

La lune, comprise comme une figure féminine, se reconnaît dans l’image de Ceridwen :

  • Elle est liée à la nuit et à ses mystères.
  • Ses métamorphoses (lune croissante, pleine lune, lune décroissante) expriment sa capacité d’adaptation à tous les espaces.
  • Elle incarne une puissance magique féminine, spécialisée dans les charmes et les enchantements.
  • Elle entretient un rapport avec l’au-delà (l’eschatologie) et avec l’inondation, symbole de débordement et de transformation.
  • Elle devient le nouveau nom de l’enfant-poète, Taliesin qui signifie « Front-d’Argent » ou « Radiant Brow », figure lumineuse et créatrice, qui se présente comme le double positif de Morvran, lié aux ténèbres.

On notera que dans le poème Kadeir Kerrituen (Book of Taliesin), elle affirme que ses lumières brillent à minuit et à l’aube.

« À minuit et au petit matin brillent mes lumières »

Ceridwen, gardienne de l’inspiration

« À minuit et au petit matin brillent mes lumières » évoque sans nul doute la lumière de l’inspiration poétique, qui apparaît dans les moments liminaux comme la nuit profonde et l’aube. Dans la tradition bardique, ces heures sont considérées comme des seuils propices à l’apparition d’une inspiration divine ou magique.

Elle mentionne aussi son « siège, son chaudron et ses lois », affirmant sa compétence à la cour de Dôn, aux côtés de figures comme Euronwy.

  • La chaire symbolise le siège de l’autorité bardique,
  • le chaudron est le chaudron d’inspiration, source de savoir et de poésie,
  • et les statuts représentent les lois ou règles de l’art bardique.

Ceridwen se présente ainsi comme maîtresse de l’inspiration et de la connaissance.

Certains poèmes moyen-gallois associent à Ceridwen et à l’inspiration un terme mystérieux, ogyrven, dont le sens reste obscur mais qui semble lié à la puissance créatrice et inspiratrice qu’elle incarne.

Le chaudron de sagesse et d’inspiration

La symbolique du chaudron dans la tradition celtique :

Dans la tradition celtique, le chaudron est à la fois un objet domestique, rituel et un symbole de prestige. Réservé aux élites, il incarne l’abondance, la fertilité et le pouvoir de résurrection. Dans les récits mythologiques, il est souvent associé au souverain de l’Autre Monde, dispensateur de festins, et aux salles de banquet irlandaises dotées de chaudrons inépuisables.

De nombreux exemplaires célèbres jalonnent les légendes : le chaudron du Dagda parmi les trésors des Tuatha Dé Danann, celui de Gwigawd en Bretagne, ou encore le chaudron de régénération de Branwen dans le Mabinogi. Et évidemment, Ceridwen elle-même possédait un chaudron d’inspiration et de sagesse.

Ces récits, enrichis par la découverte archéologique du chaudron de Gundestrup (découvert au Danemark en 1891 et qui remonte probablement au Ier siècle av. J.-C.) ont conduit plusieurs commentateurs à rapprocher le chaudron celtique du Graal arthurien, matrice de transformation et de révélation.

Le chaudron de Ceridwen : peir Kerritwen

L’awen est le mot brittonique qui désigne l’inspiration poétique sacrée. Elle est imaginée comme un souffle vital qui traverse le poète, mais parfois aussi comme un fluide magique, contenu par exemple dans le chaudron de la magicienne Ceridwen, peir Kerritwen.

Dans son Dictionary of Celtic Mythology, James MacKillop indique que, dans la tradition galloise, le chaudron de Ceridwen porte le nom d’Amen (avec un m).

Métamorphose, initiation et doctrine de l’âme

Métamorphose ≠ métempsycose

L’un des chapitres du livre Les Druides, de Guyonvarc’h et Leroux, traite de la doctrine de l’immortalité de l’âme et de ses dérivés : la métempsycose et la métamorphose.

À partir des témoignages des auteurs antiques et des récits insulaires irlandais et gallois, Guyonvarc’h et Leroux y démontrent que l’immortalité était considérée comme le destin commun de l’âme humaine, tandis que la métempsycose n’apparaissait que dans quelques cas mythiques exceptionnels, et que les métamorphoses relevaient surtout de pratiques magiques ou symboliques.

Ils prennent notamment l’exemple de Ceridwen et de sa poursuite de Gwion Bach pour illustrer non pas une transmigration de l’âme, mais la pratique des métamorphoses rituelles : des transformations provisoires qui expriment la multiplicité des formes de l’être sans jamais rompre la continuité de l’identité.

La poursuite et les métamorphoses

Après avoir bu les trois gouttes magiques destinées à Morvran, Gwion Bach subit une série de transformations : il devient lièvre, poisson, oiseau, grain de blé et d’autres formes, tandis que Ceridwen le poursuit sous différentes apparences.

Dans le poème, ces métamorphoses sont précédées de réflexions sur l’histoire du monde. Elles sont décrites dans un poème du Livre de Taliesin (Poèmes 19–23, souvent cités d’après l’incipit Angar Kyfyndawt). Elles illustrent la fuite, la survie et l’acquisition progressive du savoir. Chaque forme assumée représente une expérience directe du monde et prépare Gwion à sa renaissance sous le nom de Taliesin, poète inspiré et détenteur de la sagesse.

Un motif comparable se retrouve dans un poème irlandais attribué au poète légendaire Amergin, dans lequel il se présente sous diverses formes et forces de la nature :

« Je suis le vent sur la mer, la vague de l’abîme, le taureau des sept batailles, l’aigle sur le rocher, une larme du soleil… ».

Dans les traditions galloise et irlandaise, ces transformations successives, animales ou naturelles, expriment non seulement la survie miraculeuse de figures très anciennes, telles que Fintan ou les Deux Porchers, mais symbolisent également l’acquisition par le poète d’une connaissance universelle et d’une expérience multiforme.

Fonction initiatique

Ceridwen, l’initiatrice

  • Figure de l’Autre MondeCeridwen est une magicienne, gardienne du chaudron de savoir, elle incarne la puissance féminine créatrice et destructrice.
  • Sa fonction : elle poursuit Gwion pour récupérer les trois gouttes de science qu’il a volées. Sa chasse est une épreuve initiatique où elle déploie la maîtrise des métamorphoses.
  • Son rôle symbolique : elle est l’agent de la transformation, celle qui pousse l’initié à traverser les formes pour atteindre un état supérieur.

Gwion Bach/Taliesin

  • L’initié : il reçoit par hasard les 3 gouttes de savoir, ce qui le met en mouvement vers une destinée nouvelle.
  • Les métamorphoses : lièvre, poisson, oiseau, grain de froment… chacune est une étape de fuite et de survie, mais aussi une traversée des règnes du vivant.
  • La renaissance : avalé par Ceridwen sous forme de grain, il renaît comme Taliesin, le poète inspiré, détenteur du savoir.
  • Sens : Gwion est un exemple de métamorphose initiatique qui conduit à une nouvelle identité spirituelle.
  • Changement d’état : Gwion devient Taliesin, ce qui est plus qu’une métamorphose : une véritable renaissance initiatique, qui l’élève au rang de poète inspiré, figure prophétique.

Approches comparées et parallèles

Ceridwen est souvent décrite comme une sorcière ou une vieille femme peu aimable. On peut rapprocher cette image d’autres figures féminines de la tradition celtique, comme :

    • Cailleach Bheirre (la vieille femme des montagnes en Écosse),
    • Caitlin,
    • Sean-Bhean Bhocht (la « pauvre vieille » en Irlande).

Dans la tradition bretonne, le récit de Koadalan présente aussi des parallèles intéressants. Koadalan, qui signifie « Bois‑Alan », est le héros d’un conte. Son récit reprend, sous des formes variées, le thème de la poursuite que l’on retrouve dans la tradition galloise autour de Gwion Bach‑Taliesin.

Sources

Sources primaires :

  • Book of Taliesin. Middle Welsh manuscript Peniarth MS 2. Première moitié du XIVᵉ siècle.
  • Red Book of Hergest (Llyfr Coch Hergest), Oxford, Jesus College, MS 111. Fin XIVᵉ siècle (après 1382).
  • Trioedd Ynys Prydein: The Triads of the Island of Britain. Manuscrits médiévaux gallois (divers, datés XIIIᵉ–XIVᵉ siècles).

Autres sources :

  • Guyonvarc’h, Christian-J. et Françoise Le Roux. Les Druides. Paris : Payot, 2001.
  • Jouët, Philippe. Dictionnaire de la mythologie et de la religion celtique. Paris : CNRS Éditions, 2012.
  • Lambert, Pierre-Yves, trad., prés. et notes. Les Quatre branches du Mabinogi et autres contes gallois. Paris : Gallimard, collection « L’Aube des peuples », 1993.
  • MacKillop, James. Dictionary of Celtic Mythology. Oxford : Oxford University Press, 1998.

Sources complémentaires en ligne

Bendis, déesse thrace de la lune et de la chasse

Pour ce nouveau mois lunaire, j’ai effectué quelques recherches sur Bendis, la déesse thrace de la lune et de la chasse. Il n’existe pas énormément d’informations sur cette divinité, mais voici les éléments que j’ai commencé à rassembler et à mettre en forme.

Origines et assimilation grecque

Nom grec : Βένδις
Translittération : Bendis
Nom latin : Bendis

Bendis était une divinité thrace liée à la lune et à la chasse.  Elle était vénérée particulièrement dans le sud-ouest de la Thrace, dans les vallées des fleuves Strymon, Nestus et Axius, ainsi que par les Bithynes, une tribu thrace installée en Anatolie. Elle était également connue sous d’autres noms et épithètes : Kottyto, Hipta ou Hippa, et Perke (« rocher » ou « sommet de montagne »).

Elle a été intégrée au panthéon athénien à partir du IVᵉ siècle av. J.-C. Les Grecs assimilèrent Bendis à Artémis, et parfois à Hécate, Séléné ou Perséphone, en fonction des aspects de sa divinité (lune, chasse, aspects chthoniens ou protecteurs).

En dehors des régions adjacentes à la Thrace, le culte de Bendis n’a pris de l’importance qu’à Athènes.

Son épithète dílonkhos (du grec διλόγχος) signifie littéralement « à deux lances » ou « portant deux lances ». En effet, elle est traditionnellement représentée tenant deux lances, symboles de sa fonction double : l’une pouvant être liée au ciel et l’autre à la terre, ou à ses deux lumières, la sienne propre et celle provenant du soleil.

Un temple lui était consacré à Athènes, et des fêtes en son honneur, appelées les Bendidies (Bendideia), se déroulaient peu avant les Panathénées. Ces célébrations, parfois tumultueuses, évoquaient les Bacchanales.

Selon Fol Alexander et Ivan Marazov (Thrace & the Thracians), l’étymologie la plus plausible de l’épithète Bendis renvoie à la racine indo-européenne bhendh, signifiant « lier, unir, combiner », ce qui suggère que la Grande Déesse était associée à la protection du mariage. Elle personnifiait le ciel et la terre, source de vie et ancêtre de l’humanité.

« Datation d’une plaque en bronze représentant Bendida/Bendis à Abritus, en Bulgarie. Selon les sources, la plaque serait datée soit vers 400 av. J.-C., soit vers 100 ap. J.-C. »

Culte et temple

Au déclenchement de la guerre du Péloponnèse, les Athéniens autorisèrent la fondation d’un sanctuaire pour la déesse Bendis.

Ce sanctuaire, le Bendideion, fut fondé sur la colline de Munychia, dans le port du Pirée, à proximité du temple d’Artémis Munychia et du sanctuaire des Nymphes. Les inscriptions attestent que les Athéniens autorisèrent les Thraces à acquérir le terrain pour y établir le sanctuaire, conformément à l’oracle de Dodone.

Peu de temps après, un festival public fut institué, les Bendideia, en son honneur. La première célébration eut lieu le 19ᵉ jour de Thargélion (mai–juin), en 429 av. J.-C., au Pirée, le port d’Athènes.

Le culte de Bendis fut donc officiellement reconnu à cette période.

Festival des Bendideia

Ce festival est décrit dès l’ouverture de La République de Platon, par le récit de Socrate.

Le festival des Bendideia, célébré peu avant les Panathénées, comprenait :

  • deux processions distinctes (une athénienne et une thrace au Pirée),
  • une course nocturne de torches à cheval,
  • des veillées nocturnes avec banquet et festivités.

Ces célébrations permettaient aux Thraces résidant à Athènes (esclaves, métèques, mercenaires) d’exprimer leur identité ethnique tout en respectant les lois athéniennes, comme l’atteste un décret de 240/239 av. J.-C. sur la coopération entre groupes de Thraces (orgeones).

Les Bendideia impressionnaient les Grecs. Une procession partait d’Athènes vers le sanctuaire des Nymphes au Pirée, où l’on sacrifiait une truie, symbole de fertilité. Ce rituel rappelle celui de Perséphone, où le sang du porc féconde le blé. Les offrandes des femmes thraces et péoniennes à Artémis la Reine, enveloppées de paille, soulignent les liens entre les cultes grecs et thraces de la Déesse Mère. Un squelette de porc retrouvé dans une tombe thrace de l’âge du bronze pourrait confirmer l’ancienneté de ces pratiques.


« Bendis, Apollon et Hermès, cratère campaniforme à figures rouges apulien, IVᵉ siècle av. J.-C., Museum of Fine Arts, Boston »

Iconographie et symbolisme

Bendis est représentée comme une déesse‑chasseresse portant :

  • un chiton (tunique courte)
  • parfois des bottes hautes
  • parfois un manteau animal, typiquement une peau de renard ou un vêtement similaire.
  • souvent un bonnet phrygien à pointe, symbole distinctif attesté sur plusieurs reliefs thraces et grecs.

Un de ses attributs principaux est :

  • la lance, ou la « double lance », dilonkhos, soulignant sa fonction de chasseresse (et son lien avec la lune) et, dans certains contextes, de protectrice.

Elle peut également tenir un patera ou un récipient rituel, utilisé pour recueillir le sang des sacrifices d’animaux.

Dans certaines représentations, Bendis est associée au croissant de lune, qui peut être placé sur ses cheveux ou sur son couvre-chef, symbolisant son lien avec le domaine lunaire et rapprochant son iconographie de celle de Selene ou d’Hécate. Ce motif n’est cependant pas systématique et varie selon l’époque et la région.

Selon le contexte, elle pouvait également porter torches ou branches.

Bendis possédait une double nature :

  • Bendis vierge : chasseresse, déesse du foyer et de la nature sauvage, parfois représentée avec un chien et armée d’arc et flèches, ou de ses deux lances (dílonkhos). Elle présidait aux rites d’initiation et aux guerriers.
  • Bendis matrone : protectrice du mariage, mère nourricière, symbole de fertilité et de la continuité de la royauté. Elle était représentée avec un vase et un rameau fleuri, et ses attributs soulignaient sa fonction de déesse créatrice et une pacificatrice.

Dans certaines représentations, les deux formes étaient combinées, traduisant sa nature transitoire et multifonctionnelle, parfois assise sur un lion ou lionne, reflétant l’influence iconographique de Cybèle. Sous l’influence gréco-romaine, Bendis pouvait être identifiée à Artemis, Diane, Perséphone, Séléné, Phosphoros et Hécate.

Bendis et ses adorateurs, peut-être des athlètes prenant part à la lampadédromie en l’honneur de la déesse. Relief votif en marbre, production athénienne, vers 400-375 av. J.-C. Réputé provenir du Pirée, plus probablement de la région d’un temple de Bendis à Munichie.

Bendis et Kotys

Bendis et Kotys peuvent être parfois confondues.

Kotys (ou Cotys) est une déesse thrace associée à la nuit, à la lune, à la frénésie rituelle et à l’impudeur. Son culte, originaire des Édones autour du mont Pangée, s’est diffusé de la Thrace à la Phrygie, puis à Athènes, Corinthe, la Sicile et Rome.

Comme Bendis, elle incarne des aspects marginaux et nocturnes, et ses cérémonies, les Kotytia, se rapprochent des rites orgiaques et de la transe, avec danses, cris, tambours et instruments à cordes stridents. Kotys représente une féminité sauvage, liée à la sexualité, à l’ivresse sacrée et à la transgression des normes sociales.

Peinture sur vase grec représentant une déesse, probablement Bendis ou Kotys, vêtue à la thrace, s’approchant d’Apollon assis. Kratère en cloche à figures rouges par le Peintre de Bendis, vers 380–370 av. J.-C.
Artémis Bendis, statuette en terre cuite hellénistique — vers 350-300 av. J.-C. — conservée au Louvre.

Bibliographie

Sources en ligne

Sources imprimées / académiques

Les « hex spells » par Jo Steen

Mut Danu propose dans son livre The Tree Mothers de travailler avec des « Hex spells ». Elle évoque notamment Jo Steen et donne ce lien qui pointait vers le site du Compost Coven.

Jo Steen (1930-1996) a été membre du Compost Coven de Starhawk et a transmis à ses élèves une riche palette de pratiques magiques pendant de nombreuses années. Pour elle, chaque geste pouvait devenir porteur de magie, dès lors qu’il était accompli avec intention. Elle avait une prédilection particulière pour les « hex signs », qu’elle animait d’une volonté précise. Au fil du temps, elle a constitué une collection de ces motifs traditionnels des Pennsylvania Dutch (une communauté germanophone installée en Pennsylvanie depuis le XVIIIᵉ siècle), qu’elle a ensuite enrichie de symboles africains et de talismans médiévaux. Plus tard, elle a créé des kits contenant ces motifs imprimés sur des feuilles, accompagnés d’instructions détaillées pour les colorier avec conscience.

Voici ma traduction de l’article en question.

Comment utiliser les « hex spells » :

Téléchargez et imprimez le sortilège que vous souhaitez réaliser.

  • En utilisant les correspondances des 4 ou des 7 (voir plus bas), choisissez les couleurs appropriées pour votre intention.
  • Travaillez toujours dextrogyre (dans le sens horaire) dans un but de croissance, et sénestrogyre (dans le sens anti-horaire) dans un objectif de décroissance.
  • Concentrez-vous pleinement sur votre intention pendant tout le temps où vous coloriez le sortilège : c’est un outil méditatif, semblable au yantra asiatique, mais il est aussi interactif, engageant à la fois le corps et l’esprit.
  • Ne débordez pas, autant que possible, la netteté a son importance !

Les sortilèges concernant l’intuition / la compréhension profonde / l’inspiration / la créativité et les progrès rapides nécessitent une étape supplémentaire : l’intuition, la progression, etc., s’orientent vers un but particulier. Vous devrez donc télécharger et imprimer les minihexen (voir plus bas, point #13), chacun devant s’intégrer parfaitement au centre du sort principal, afin de demander un progrès rapide dans les affaires de manifestation (un bon sortilège pour l’argent), ou un progrès rapide dans les questions de santé, et ainsi de suite.

Lorsque vous avez terminé, vous pouvez les accrocher à votre mur, les transformer en plaque, les faire reproduire sur un t-shirt ou un tapis de souris, les garder avec vous comme porte-bonheur… ou les offrir à quelqu’un à qui vous souhaitez du bien. Vous pouvez également utiliser ces motifs pour la broderie ou le point de croix (ce qui prend beaucoup plus de temps et demande beaucoup plus d’intention, rendant le sort plus puissant), pour décorer un gâteau d’anniversaire, tricoter un pull, comme modèle de tatouage : tout ce que votre cœur désire et ce que vos mains savent faire.

Les « hex spells »

[Les citations proviennent de l’ensemble imprimé des « Hex Spells » de Jo]

1. Abondance :

Ce symbole concerne l’abondance dans tous les domaines où vous pourriez en avoir besoin, pas seulement le domaine matériel.

📄 Télécharger Abondance (PDF)

2. Croissance :

Celui-ci peut également être utilisé avec les minihexen (mini « hex spells » voir plus bas, point #13) pour favoriser la croissance dans des domaines spécifiques. Veillez TOUJOURS à travailler dextrogyre, du centre vers l’extérieur, en formant une spirale de croissance.

[Jo disait : « Croissance (dans tout ce que vous désirez). La double spirale de croissance. Coloriez la figure en spirale, en travaillant dans le sens des aiguilles d’une montre, et vous accomplirez votre CROISSANCE. »]

📄 Télécharger Croissance (PDF)

3. Intuition, Inspiration et Créativité :

L’un des favoris de Jo. À utiliser avec les minihexen pour recevoir des éclairages dans la sphère de votre vie qui en a besoin.

[Jo disait : « La pluie qui rafraîchit l’âme : Intuition – Inspiration – Créativité. Un sortilège de magie verte. La pluie d’INSPIRATION traverse l’Arc-en-ciel de la PROMESSE pour venir irriguer l’ÉTOILE-TERRE. L’Étoile-Terre, avec  la fleur de l’Étoile-Terre CENTRÉE, tourne sans cesse, alternant nuit/jour, légèreté/lourdeur, etc. Coloriez dextrogyre pour favoriser la perspicacité/clarté/intuition, l’inspiration et la CRÉATIVITÉ. »]

4. Joie :

Assez évident… Utilisez des couleurs éclatantes et lumineuses, couvrant tout le spectre.

[Jo disait : « Voici la Fleur-Terre-Étoile, agencée pour susciter Joie et Bonheur. Le jaune clair, irradiant de lumière, est le point de départ. Ajoutez contraste et profondeur avec les tons riches et saturés de la terre : là où l’on trouve la joie. »]

📄 Télécharger Joie (PDF)

5. Le Temps des Lys :

Pour apporter la paix et le calme parmi les gens.

[Jo disait : « Le Temps des Lys. Dessinez et coloriez soigneusement en violet pour symboliser la noblesse. C’est un sortilège pour instaurer une ère de justice, de paix et d’amour parmi toutes les créatures, qui vivront comme des sœurs et frères. Dessinez-le souvent. »]

6. Chance en amour :

Pour donner un petit coup de pouce à votre romance.

📄 Télécharger Chance en Amour (PDF)

7. Manifestation :
Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas : manifester votre désir dans le monde. Très puissant.
[Jo disait : « Création–manifestation et matérialisation. “Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas.” Haut/bas, intérieur/extérieur, encerclé par la lemniscate, l’éternité liant toute vie ; flanqué des symboles Terre–Étoile, appelant la joie dans toutes les bonnes choses de la terre. Il s’agit d’une représentation symbolique du principe le plus fondamental de la magie sympathique. »]
8. Progrès rapide :
N’oubliez pas qu’un progrès rapide sans objectif précis ne sert à rien.
[Jo disait : « L’Étoile tourbillonnante – Progrès rapide. Placez l’un des symboles plus petits (minihexen) au centre de l’étoile pour un progrès rapide et judicieux, manifestant un changement dans la direction indiquée. »]
9. Sérénité :

Intérieure et extérieure.

[Jo disait : « Le Grand et les 7 Petits Sceaux de Sérénité. Utilisez du bleu pour la sérénité vigilante et protectrice de la création accomplie. Colorez ce sortilège en sept parties, ou sept étapes, ou voire sur sept jours : selon votre volonté, qu’il en soit ainsi / as you will, so mote it be. Étudiez la signification des feuilles. »]

📄 Télécharger Sérénité (PDF)

10. Voyage Sûr

Un ancien talisman du Moyen Âge. À porter sur soi lors des déplacements.

📄 Télécharger Voyage Sûr (PDF)

11. Amour Véritable

Pour trouver celui ou celle avec qui vous resterez.

📄 Télécharger Amour Véritable (PDF)

12. Réparez vos Erreurs

Un des favoris de Jo. Vous pouvez TOUJOURS réparer vos erreurs.

[Jo disait : « Ayez Foi ! Vous pouvez toujours réparer vos erreurs. Sortilège trois-en-un. Deux parties africaines. Une partie HEX spell. Il rendra votre foyer sûr, remplira votre cœur de confiance, et vous donnera le courage de recommencer. »]

📄 Télécharger Annuler Vos Erreurs (PDF)

13. Mini-sorts Hex à utiliser au centre de l’IIC (Intuition, inspiration, créativité) ou du Progrès Rapide

📄 Télécharger Mini-sorts Hex (PDF)

Correspondances des 4 (directions)

Direction Est Sud Ouest Nord
Pierres opale blanche, topaze cornaline, opale mexicaine, héliotrope, rubis émeraude, opale triplet, saphir, aigue-marine agate mousse, opale matricielle
Bois frêne, bouleau pin, cèdre saule, aulne sorbier, sureau
Huiles santal, lavande, cannelle laurier, camomille, clou de girofle, patchouli romarin, myrrhe, gaulthérie rose, iris, musc, menthe, jasmin
Sabbat Eostre (Équinoxe de printemps) Litha (Solstice d’été) Mabon (Équinoxe d’automne) Yule (Solstice d’hiver)
Saison Printemps Été Automne Hiver
Élément Air Feu Eau Terre
Outil Athamé Baguette Calice Pentacle
Couleur Jaune Rouge Bleu Vert
Moment du jour Aube Midi Crépuscule Minuit
Partie du corps Souffle Aura Sang Chair & Os
Animal Aigle Lion Serpent Taureau
Attribut Joie Puissance Fécondité Sécurité
Mental Intellect Intuition Émotion Sensation
Alchimie Évaporation Combustion Solution Fixation
Étape de vie Naissance Croissance Mort Décomposition
Âge Enfance Jeunesse Maturité Vieillesse
Pouvoir de la sorcière Imagination Volonté Foi Secret

Correspondances des 7 (planètes)

PLANÈTE Soleil Lune Mars Mercure Jupiter Vénus Saturne
JOUR Dimanche Lundi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi Samedi
RÈGNE SUR Ego, renommée, extraversion, individualité, esprit conscient, joie, succès, avancement, leadership, pouvoir naturel, amitié, croissance, guérison, lumière Émotions, psychisme, intuition, esprit subconscient ; femmes, cycles, naissance, génération, inspiration, poésie, voyage (surtout par l’eau), mer et marées, fertilité, pluie, secrets, rêves, magie et glamour, tromperie Corps physique, chaleur, actions, agressivité, pouvoir, énergie, athlétisme ; force, lutte, guerre, conflit, confrontations physiques d’amour ou de haine, malédictions explosives, guérison des blessures Intellect, rapidité, messages, dualité, jeunesse, communications, intelligence, astuce, créativité, science, mémoire, transactions commerciales, vol, apprentissage Expansion, argent, possessions matérielles Amour, harmonie, esthétique, amitié, confort et luxe, gain matériel Constriction, ordre, règles, pessimisme, mort, froid, discipline, obstacles, limitations, liens, savoir, bâtiments, histoire, temps, changements longs et lents, vieillesse, sagesse de l’expérience
COULEUR Orange Blanc Rouge Jaune Violet Bleu-vert Noir
MÉTAL Or Argent Fer Mercure Étain Cuivre Plomb
PIERRE  Topaze Pierre de lune Héliotrope Opale de feu Améthyste Émeraude Obsidienne

* Les Pennsylvania Dutch sont les descendants actuels de plusieurs vagues d’immigrants germanophones venus d’Europe à partir de la fin du XVIIᵉ siècle et jusqu’à la période de la Révolution américaine, et peu après. Ils venaient principalement d’Allemagne centrale et occidentale (Rhénanie-Palatinat, Hesse rhénane, Bade-Wurtemberg), de régions germanophones de Suisse, d’Alsace (aujourd’hui en France), et de Silésie (aujourd’hui en Pologne et République tchèque). Ils étaient majoritairement agriculteurs, fuyant les guerres, troubles économiques et persécutions religieuses.

Photo : ?

[La Déesse Blanche] G pour GORT

G pour GORT

Les Mythes Celtes, la Déesse Blanche par Robert Graves. Pages 210-212.

Le onzième arbre est le lierre à l’époque de sa floraison. Octobre était la saison des Bacchanales de Thrace et de Thessalie pendant lesquelles les Bassarides couraient comme des sauvages à travers les montagnes en agitant les branches de sapin de la reine Artémis (ou Ariadne). Les branches, mêlées à du lierre, à fruits jaunes, étaient disposées en spirales. Le lierre était employé en l’honneur de Dionysos, le Dionysos d’automne, qu’il faut distinguer du Dionysos du solstice d’hiver, lequel est, en réalité, un Héraclès. Ils s’étaient tatoué un chevreuil sur leurs bras droits au-dessus du coude. Dans leur fureur sacrée, ils mettaient en pièces faons, chevreaux, enfants, voire même des hommes. Le lierre était consacré à Osiris aussi bien qu’à Dionysos. Vigne et lierre se rejoignent à ce tournant de l’année et symbolisent ensemble la résurrection, sans doute parce que ce sont là les deux seuls végétaux du Beth-Luis-Nion qui poussent en spirales. Si la vigne symbolise la résurrection, c’est aussi parce que sa force est transmise par le vin. En Angleterre, les rameaux de lierre ont toujours servi d’enseignes aux débits de vin, d’où le proverbe : « Bon vin se passe de lierre » et l’on brasse encore une bière de lierre, breuvage médiéval hautement toxique, au Trinity College d’Oxford en mémoire d’un étudiant de ce collège assassiné par les hommes de Balliol.

Il est probable que la boisson des Bassarides était la bière de sapin, brassée à partir de la sève de l’épicéa et assaisonnée de lierre ; à moins qu’ils ne mâchassent des feuilles de lierre pour leur effet de drogue. Cependant, le principal élément toxique de la drogue des Ménades a pu être l’amanita muscaria, le « tabouret de crapaud », champignon tacheté de points blancs qui seul peut fournir la force nécessaire.

Ici nous devons reconsidérer Phoronée, le Dionysos du printemps, inventeur du feu. Il bâtit la cité d’Argos dont l’emblème, selon Apollodore, était un crapaud ; de même Mycènes, la principale forteresse de l’Argolide, aurait été ainsi appelée, à en croire Pausanias, parce que Persée, un converti au culte de Dionysos, aurait trouvé un « tabouret de crapaud » poussant sur le site. Dionysos avait deux fêtes :

  • au printemps, l’Anthestérion ou « Éclosion des Fleurs »,

  • et, à l’automne, le Mystérion, qui signifie probablement « Éclosion des Champignons » (Mykostérion), auxquels on donnait encore le nom d’ambroisie (« nourriture des dieux »).

Fut-ce Phoronée qui découvrit également un feu divin résidant dans ce champignon, ou bien fut-ce Phrynée (« l’Être-Crapaud ») ? L’amanita muscaria, bien qu’elle ne soit pas un arbre, pousse sous un arbre : toujours un bouleau dans le Nord, depuis la Thrace et les pays celtiques jusqu’au cercle arctique ; mais sous un sapin ou un pin dans le Sud de la Grèce ainsi que de la Palestine à l’équateur. Dans le Nord, elle est rouge ; dans le Sud, elle est fauve. Et ceci n’expliquerait-il pas la préséance accordée à l’épicéa parmi les voyelles en tant que A et au bouleau parmi les consonnes en tant que B ? Cela pourrait-il apporter un supplément d’information au sujet de l’énigme sur le « Christ fils d’Alpha » ?

La rivalité entre le houx et le lierre, mentionnée dans les poèmes médiévaux, n’est pas, comme on pourrait le supposer, celle qui pourrait exister entre l’arbre du meurtre et celui de la résurrection, entre Typhon-Seth et Dionysos-Osiris ; nullement : elle symbolise la guerre domestique entre les sexes. L’explication semble en être que, dans certaines parties de l’Angleterre, la dernière gerbe de la moisson à être charriée dans une paroisse quelconque était liée avec le lierre osirien et appelée le Mai de la Moisson, la Fiancée de la Moisson ou la Fille du Lierre : c’était au dernier fermier à rentrer sa moisson qu’il incombait de donner la Fille du Lierre en pénalité, présage de mauvais sort jusqu’à l’année suivante. C’est ainsi que « lierre » en vint à signifier « mégère » ou épouse acariâtre : le lierre étrangle les arbres, ce qui confirme la comparaison.

Mais le lierre et le houx étaient tous les deux associés aux saturnales, le houx étant la canne de Saturne, le lierre étant le nid du roitelet à cimier doré, son oiseau. Le matin de Noël, le dernier de son joyeux règne, le premier pied à franchir le seuil était censé être celui du représentant de Saturne, évoqué comme un homme sombre nommé le Gars du Houx, et l’on prenait de sérieuses précautions pour tenir les femmes hors de son passage. Ainsi donc la Fille du Lierre et le Gars du Houx en vinrent à s’opposer, ce qui donna naissance à la coutume de Noël selon laquelle les garçons du lierre et les filles du lierre jouaient aux gages pour obtenir la préséance et chantaient des chansons, surtout satiriques, à l’adresse les uns des autres. Le mois du lierre s’étend du 30 septembre au 27 octobre.

Une interview d’une faerie queen

Il s’agit d’un épisode du podcast (anglophone) Southern Fried Witch, durant lequel l’animatrice du Sud des États-Unis s’entretient avec Linda Kerr, grande prêtresse de la Faerie Faith et pionnière du paganisme en Alabama. Ensemble, elles évoquent la création de la communauté païenne locale et la manière de vivre sa spiritualité dans une région profondément chrétienne. L’épisode, publié le 28 janvier 2021, offre un témoignage intéressant sur la vie spirituelle alternative du Sud, mêlant sagesse, humour et amour de la nature.

Dans cet épisode du podcast Southern Fried Witch, l’animatrice rencontre Linda Kerr, figure majeure du paganisme en Alabama, grande prêtresse de la Faerie Faith et ancienne élève d’Epona.

Engagée dans la communauté, elle a fondé plusieurs initiatives païennes, dont les festivals Moon Dance et FallFling, ainsi que Church of the Spiral Tree CST, une église païenne non lucrative et ouverte à toutes les traditions, et la Sacred Grove Academy, une école favorisant l’instruction à domicile dans un esprit païen, hors cadre chrétien ou laïc.

Linda Kerr y présente la Faerie Faith, qu’elle décrit davantage comme une philosophie de vie, plutôt que comme une religion à proprement parler.

Pour Linda, la pratique doit rester libre, sans dogmes ni divinités imposées, chacun adaptant son chemin selon son évolution personnelle. D’ailleurs, elle se dit agnostique, voire athée, considérant la nature comme une entité vivante et « presque » consciente, mais rejetant les notions de destin ou de karma. Pour elle, la magie réside dans la capacité à façonner sa propre réalité.

Sa vision d’une spiritualité autonome, évolutive et enracinée dans le vivant fait de cet entretien un témoignage plutôt rare et inspirant du paganisme contemporain du Sud des États-Unis.

Voici le lien direct de l’interview vers le blog :  https://southernfriedwitch.com/podcast/s2e6-interview-with-a-queen-an-alabama-pagan-heretic

Spiniensis : le dieu des épines dans la Rome antique

En explorant les symboles de ce mois dans notre système Faerie Faith, j’ai découvert un dieu un peu particulier, qui parlera sans doute à tout détenteur de jardin en friche, envahie par les ronces ;o)

Dans la religion romaine ancienne, chaque aspect de la vie quotidienne pouvait être associé à une divinité spécifique. Parmi ces dieux mineurs se trouvait Spiniensis, dont le rôle était lié aux épines et aux buissons épineux.

Son nom vient du latin spina, qui signifie « épine ».

Spiniensis semble avoir été invoqué principalement par les paysans lors de travaux agricoles, notamment pour défricher les champs ou éliminer les buissons épineux qui gênaient les cultures. Les Romains croyaient que cette divinité pouvait faciliter ces tâches et protéger leurs terres contre les nuisances causées par les épines.

Sa mention apparaît notamment chez Saint Augustin dans La Cité de Dieu, où le philosophe critique la multiplicité des divinités romaines, soulignant l’étrangeté d’invoquer un dieu pour une tâche aussi spécifique que l’arrachage des épines. Pour Augustin, une divinité unique et bienveillante suffirait à protéger l’homme de tous les maux.

« Encore une fois, qu’était-il nécessaire, pour obtenir les biens de l’âme ou ceux du corps, ou les biens extérieurs, d’adorer et d’invoquer cette foule de dieux que je n’ai pas tous nommés, et que les païens eux-mêmes n’ont pu diviser et multiplier à l’égal de leurs besoins, alors que la déesse Félicité pouvait si aisément les résumer tous ? Et non seulement elle seule suffisait pour obtenir tous les biens, mais aussi pour éviter tous les maux ; car à quoi bon invoquer la déesse Fessonia contre la fatigue, la déesse Pellonia pour expulser l’ennemi, Apollon ou Esculape contre les maladies, ou ces deux médecins ensemble, quand le cas était grave ? à quoi bon enfin le dieu Spiniensis pour arracher les épines des champs, et la déesse Rubigo pour écarter la nielle ? La seule Félicité, par sa présence et sa protection, pouvait détourner ou dissiper tous ces maux. Enfin, puisque nous traitons ici de la Vertu et de la Félicité, si la Félicité est la récompense de la Vertu, ce n’est donc pas une déesse, mais un don de Dieu ; ou si c’est une déesse, pourquoi ne dit-on pas que c’est elle aussi qui donne la vertu, puisque être vertueux est une grande félicité ? »

Peut-être que saint Augustin aurait été moins catégorique s’il avait eu à défricher un champ de ronces en sandales ;o)

Spiniensis faisait partie des indigitamenta, une liste de divinités officielles dans la religion romaine, supervisée par le Collège des Pontifes pour s’assurer que les bons noms divins étaient invoqués dans les prières publiques. Même si cette divinité est peu documentée, elle témoigne de la richesse et de la diversité du panthéon romain, qui comprenait des dieux pour les aspects les plus précis de la vie quotidienne.

Sources :

Illustration : Brian Froud, Goblin and Knight on White Horse Fantasy Illustration, 1976.

La fée des ronces (aime bien picoler)

Durant le prochain mois lunaire, qui débutera le 21 septembre, juste avant l’équinoxe d’automne cette année (22 septembre), nous célébrerons la vigne et la ronce. Pour bien commencer, voici un peu de folklore sur les fées, qui rapproche nos deux alliées végétales et explique bien des choses ;o)

Dans les Alpes, une fée à qui l’on avait fait boire du vin et qui s’était retrouvée toute guillerette demanda aux gens ce qu’était cette fabuleuse boisson.

Par crainte de voir le vin gâché et la vigne punie si la question de la fée cachait sa colère d’avoir été soûlée, les pauvres vignerons désignèrent la ronce.

La fée, croyant alors bien faire, pour récompenser la noble plante qui donnait un jus si délicieux, la dota d’une qualité magique : partout où elle touchera terre, elle prendra racine.

C’est depuis lors que la ronce, et malheureusement non la vigne, pousse et repousse de partout !

Source : ?

Illustration : Une petite fée mignonne et un peu tarte :) « The Blackberry Fairy », Cicely Mary Barker.

Courir avec Artémis, par Mut Danu

Note de Fleur de Sureau : Ce texte, intitulé Running with Artemis, est signé Mut Danu. Je l’avais gardé précieusement dans les brouillons du blog, avec l’envie de le traduire un jour pour le coven (Mut Danu étant notre aînée dans la tradition et nous apprécions tous son travail). À l’époque, on pouvait encore le retrouver en ligne, mais il ne semble plus disponible aujourd’hui. Je me suis permise de le traduire, de l’adapter et de le publier ici (en espérant ne pas manquer de délicatesse ce faisant). Pour ce mois d’études, mes recherches m’ont amené à lire beaucoup sur Artémis, la mythologie et l’histoire de la Grèce antique. Ce texte résonne bien plus clairement aujourd’hui pour moi et c’est la raison pour laquelle j’ai eu envie de le traduire. J’ai notamment ressenti un certain… désenchantement (?) en découvrant les enjeux politiques et sociaux qui se cachaient derrière les chœurs de jeunes filles dans les temples d’Artémis.

Courir avec Artémis*

« Libre !
Dans la verdure, dans la clairière joyeuse, bondissant telle une biche qui ne craint aucun chasseur.
Là, je danserai sans que nul homme ne me regarde
Là, je trouverai la sagesse inscrite dans les ombres de la forêt.
Existe-t-il un don plus grand que de ressentir une telle joie ? »

Chant d’une Ménade, extrait des « Bacchantes », d’Euripide**.

Tenter de me rapprocher d’Artémis, c’était parfois comme courir après la Déesse, les bottes alourdies par la boue. Elle se tenait là, loin devant, belle, puissante, et pourtant je ne parvenais pas à la distinguer nettement. Tant d’obstacles sur la route ! En explorant la mythologie, j’ai découvert des millénaires de messages brouillés, issus de nombreuses cultures : certaines l’aimaient tant qu’elles voulurent l’intégrer à leur culte local, à leur propre déesse. Et puis il y avait les autres. Les écrits classiques étaient imprégnés de la culture souvent misogyne de la Grèce antique ; puis vinrent la lecture déformée et l’idéologie patriarcale de l’ère chrétienne. Pour vraiment la voir, il fallait lire entre les lignes, et faire appel à beaucoup d’intuition.

Voici ce que me souffle mon intuition… Qu’il me faut gratter la boue de mes bottes, ou mieux encore les abandonner et courir pieds nus, trouver une manière de courir avec Artémis… mère du sauvage, des bêtes indomptées, du toi sauvage et du moi sauvage. Comment les Amazones couraient-elles aux côtés d’Artémis ? Quelle était la résonance de leurs chants, quels rythmes battaient leurs tambours lorsqu’elles l’honoraient ?

Si seulement les chants, les rites et les arts des Amazones nous avaient été transmis avec soin… S’ils avaient survécu aux flammes, aux guerres et aux caprices des modes, quel trésor ce serait pour nous qui vivons aujourd’hui !
Ce qui a traversé le temps, ce sont des mythes et des légendes, souvent rédigés par d’autres. De grands temples ont traversé les âges jusqu’à ce que l’histoire en soit consignée par écrit, et aujourd’hui, nous pouvons les relire à travers le regard des femmes***. Je pleure la perte des récits à la première personne, mais une note d’espoir demeure : les légendes nous sont parvenues – incomplètes, certes, mais nous pouvons les reconstituer et lire entre les lignes. Les chercheurs peuvent réévaluer les théories anciennes.
Et nous, nous pouvons ressentir, plonger au plus profond de notre mémoire ancestrale et de notre intuition pour y trouver des réponses : communiquer à travers le temps avec nos mères antiques, dans les temples.

Bien avant que nous ne lui ayons donné un nom, elle était déjà la Mère Sauvage. Au Paléolithique et au début du Néolithique, tout était sauvage, et nous étions en plein cœur de cette sauvagerie. La distinction entre le « sauvage » et le « civilisé » n’existait pas encore. Nous n’avions pas encore commencé à domestiquer les animaux ni les plantes, et nous, enfants humains, n’étions pas séparés de ses autres enfants. À cette époque, nous savions que la Mère donnait tout et reprenait tout : elle offrait nourriture, animaux et plantes, puis reprenait après. La chasse n’était pas un massacre de masse, mais la réception d’un don, celui de la Mère et de l’esprit de l’animal, qui, après la mort, retournait vivre auprès d’elle. Le rituel est né comme un réenactement du cercle vie-mort-vie. La vie était circulaire, saisonnière, à l’image de la Mère.

Puis les choses se sont accélérées, et le flux du Temps s’est mis à couler dans une seule direction : en ligne droite, bien sûr… Les arts créatifs sacrés, comme la poterie et le tissage, ont commencé à se fabriquer en masse ; le commerce est né, suivi des échanges et des migrations. Peuples, tribus et leurs animaux domestiques se sont mis en marche, découvrant de nouveaux territoires, luttant pour les ressources et repoussant les populations autochtones. Tout cela a commencé il y a plus de 5 000 ans, et bien que nos techniques modernes soient plus destructrices et que nous soyons des milliards de plus, le patriarcat n’a en réalité inventé aucune nouvelle méthode de conquête. (Il ne fait que détruire plus rapidement.)

Et pourtant ! Au cœur de ce nouveau monde de vacarme et de confusion, Artémis continuait de répandre sa promesse d’abondance, comme le lait débordant des seins d’une mère. Il semble que les premières mentions du culte d’Artémis soient celles qui parlent des Amazones, qui auraient apporté son culte de la Macédoine et de la Thrace jusqu’à Éphèse. L’image qui nous est parvenue de cette facette de la déesse est celle d’Artémis d’Éphèse, Polymastos, la Déesse aux multiples seins. Elle incarne la puissance nourricière et généreuse de la nature, déesse du lait et du miel. Son corps était couvert de seins et de reliefs sculptés représentant des animaux. Ses pieds se rejoignaient en une posture pointue, qui semble faire écho à notre ancienne Grande Déesse des cavernes, dont les pieds effilés pouvaient s’enfoncer dans la terre meuble.

Les Arcadiens ont érigé des temples dédiés à Artémis partout dans cette région de la Grèce antique. Ils la percevaient autrement : comme la jeune Maîtresse indépendante des Animaux, et c’est cette image que son nom évoque encore pour la plupart d’entre nous. C’est à ce moment que les couches patriarcales commencent à recouvrir cette image. Une grande partie de nos représentations mentales d’Artémis a été façonnée par Homère dans l’Iliade, par Callimaque et par Nonnos. Des couches supplémentaires ont ensuite été ajoutées par les peintres de cour européens du XVIIIe siècle, qui ont réalisé des fresques murales et des œuvres d’art séculières à grande échelle inspirées des mythes grecs et romains redécouverts.

Nos ancêtres l’ont réellement portée avec eux à travers tout le bassin méditerranéen. La Grande Déesse Artémis était vénérée depuis les rivages de l’Anatolie (l’actuelle Turquie) jusqu’à la côte ibérique (l’actuelle Espagne), au nord jusqu’en Thrace (Bulgarie), au sud jusqu’en Afrique du Nord. Partout où elle allait, son nom reflétait les peuples qui l’adoraient. Elle devenait alors Diane, Artémis-Britomartis-Dame des Filets, Artémis Ephesia, Artémis Némétona, Titanis Phoibe, et tant d’autres.

Au fil des millénaires, elle a été transformée par des cultures davantage intéressées par un Dieu-père tout-puissant que par une Déesse-mère. Artémis fut alors considérée comme une enfant de Zeus, son droit à conserver sa virginité lui étant accordé par lui. Sa passion était la chasse plutôt que la protection de la faune, et sa silhouette était décrite comme “grande et masculine”. Les prêtres de ses temples exigeaient des sacrifices sanglants. Elle était grande et redoutée, et les gens la percevaient selon le contexte de leur époque, leurs besoins politiques et leurs tendances religieuses.

Ainsi se déroule l’expérience humaine de la Déesse. La Grande Déesse du Paléolithique et du Néolithique, dans l’image comme dans l’esprit, a été remodelée et soumise par le raz-de-marée de la culture patriarcale. Pourtant, elle est toujours restée, Dame des Choses Sauvages, trop puissante pour disparaître, trop sauvage pour être domestiquée. C’est cette Artémis Sauvage, éternellement libre, Déesse des Amazones, Mère du Lait et du Miel, qui peut nous apprendre ce que cela signifie d’être une Femme Sauvage… ou un Homme Sauvage.

On peut considérer qu’Artémis n’influence que trois sphères de nos vies : la fin, le milieu et le commencement ! Artémis était connue pour offrir une fin sacrée à la vie, et les femmes en particulier l’invoquaient pour qu’elle décoche ses flèches, leur permettant de bénéficier d’une “mort rapide”. En tant que sage-femme divine, les nouveau-nés étaient sous sa protection. Mais ce qui paraît le plus fascinant, c’est de pouvoir connaître cette déesse dans l’espace entre le commencement et la fin.

Les animaux sauvages et féroces devenaient dociles en présence d’Artémis. La nature est son élément, et elle est sauvage, aussi les animaux percevaient-ils ce lien. Nous avons nous aussi une nature sauvage. Lorsque nous nous retrouvons coincés dans un travail oppressant, ou lorsque nous nous rebellons contre un mode de vie trop rigide ou des attentes trop strictes à notre égard, c’est notre moi sauvage et naturel qui frappe contre les barreaux de sa cage, ou qui ronge sa propre patte pour tenter de s’échapper. Il peut être nécessaire de changer de travail, de relation ou de mode de vie pour plier les barreaux suffisamment et se faufiler dehors. Il se peut que tu doives renoncer à quelque chose de précieux, mais c’est possible. Cela demande du courage et une écoute attentive de ton animal intérieur. Une fois libéré·e, ton esprit peut courir, s’étendre, explorer, et tu auras la capacité d’apprivoiser n’importe quel environnement, qu’il s’agisse d’un désert ou d’une jungle urbaine.

Il existe une sauvagerie en chaque femme, qui peut et doit être explorée… As-tu entendu parler des Ménades ?

Méprisées, considérées comme des « folles », des « hystériques »… eh bien, évidemment qu’elles l’étaient ! Ne devenons-nous pas tous fous à force de nous contraindre à être trop civilisés, trop longtemps ?
Longtemps reléguées au domaine du mythe, les Ménades étaient des femmes bien réelles, vivantes, qui avaient compris que la « démocratie » de la Grèce classique n’était en réalité qu’une bonne affaire pour les hommes blancs et libres. Les femmes partirent. Pour de courtes périodes, ou peut-être pour toujours, elles quittèrent la « civilisation » et allèrent vivre dans les lieux sauvages. Artémis était leur déesse, Dionysos, leur dieu hermaphrodite. En sécurité dans les forêts montagneuses, les femmes dansaient de manière extatique, avec la joie de la vraie liberté. La rumeur se répandit dans toute la campagne : qu’aucun homme n’ose troubler ces femmes, sous peine d’être mis en pièces ! Des groupes de femmes se formèrent dans toute la Grèce antique et furent mentionnés par les auteurs de l’époque, parfois favorablement, souvent non. Elles furent laissées en paix.

Les femmes doivent puiser dans cette sagesse ancienne de nos aïeules qui vénéraient Artémis. Nous avons besoin de temps rien que pour nous ! À aucune époque de l’histoire les femmes n’ont été aussi isolées qu’aujourd’hui. Autrefois, même dans la mémoire vivante, les femmes passaient beaucoup plus de temps ensemble. Dans l’histoire américaine, il y avait les cercles de couture, de patchwork, de cuisine collective et bien d’autres moments communautaires pour partager nos histoires. En Europe, chaque village avait un lavoir commun, où les femmes frottaient les vêtements et résolvaient en même temps de nombreux problèmes. Depuis l’ère industrielle, lorsque les femmes ont massivement rejoint les usines et les bureaux, on a ressenti le besoin de contrôler leur travail. Mais être ensemble au travail ne signifie pas nécessairement que nous partagions quelque chose de positif. Être ensemble en dehors du travail est suspect. Cela rend les maris et les petits amis nerveux. Mais être ensemble pour le plaisir, c’est exactement ce dont nous avons besoin. Un peu de liberté, et nous aussi commencerons à danser de manière extatique. Qu’ils transpirent un bon coup !

Il y avait, et il y a, des hommes aimant les Déesses qui ont suivi Artémis. Les hommes de la Grèce antique ne pouvaient imaginer que les femmes faisaient autre chose que s’adonner à un sexe débridé hors mariage… alors ils ont inventé les “satyres”. Mais il est probable que les femmes n’étaient pas dans les bois à faire des orgies avec des satyres : elles voulaient simplement qu’on les LAISSE TRANQUILLES. Pourtant, l’intuition suggère qu’il y avait aussi des hommes vivant dans les lieux sauvages. Des hommes qui ne voulaient pas vivre comme des esclaves, qui n’appartenaient pas à la classe privilégiée par la démocratie, et qui n’étaient pas non plus des ermites ayant rejeté la civilisation pour la nature sauvage. Les hommes féministes vivant dans notre monde moderne peuvent parfois rencontrer plus de difficultés que les femmes. Comme Dionysos, ce sont des Fils de la Mère. Ils sentent en eux la présence du Féminin Divin. La culture dominante ne soutient certainement pas les hommes qui ont quoi que ce soit à voir avec le Féminin sacré. Des traîtres !… Et même les femmes féministes ne savent pas toujours quoi penser de ces hommes. Peut-on leur faire confiance ?

Nous devrions ! Nous devrions leur faire confiance et les encourager à chercher la Déesse si c’est là que leur cœur les mène. C’est lorsque nous courons tous avec la Déesse, sauvages, libres, que nous goûtons à la joie. (Même si ce n’est que pour quelques heures le week-end !) Quand nous dansons pieds nus et courons avec abandon, nous pouvons puiser dans cette énergie joyeuse et l’insuffler dans notre vie quotidienne.

Maintenant, cesse de courir.
Ce que tu cherches est ici.
Écoute.
Écoute ton cœur qui bat à toute vitesse,
écoute vraiment.

Artémis murmure :

« Si tu veux venir avec moi alors…
dépasse le faire,
et entre dans le Vivant. » »

« Si tu veux venir avec moi alors…
Cesse de t’égarer dans les gestes, les routines ou le tumulte ;
et fais l’expérience sacrée de la Vie. »

Mut Danu, grande prêtresse Apple Branch, une tradition dianique. Solstice d’hiver 2007.

« Running with Artemis » by Mut Danu. The Oracle Magazine Winter Solstice, 2007.

Notes :

* Courir avec Artémis est une allusion aux Héraia.  https://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9raia

** Je n’ai trouvé ce texte qu’à un seul endroit sur le net : https://moongoddess14.tripod.com/id4.html
Poème d’ouverture d’Euripide, vers 480 av. notre ère, « Les Bacchantes ».

*** La phrase « Great Temples survived into recorded history, and now herstory » contient un jeu de mots subtil entre “history” et “herstory”.  “History” signifie l’histoire telle qu’on l’a traditionnellement écrite, souvent centrée sur les hommes. “Herstory” est un terme inventé pour mettre en avant l’histoire des femmes, ou l’histoire racontée du point de vue féminin. Donc, l’idée est que les grands temples ont survécu jusqu’à l’époque où l’histoire a été consignée par écrit (recorded history), le principe de l’histoire, et qu’aujourd’hui, nous pouvons les reconsidérer à travers une perspective féminine.