Les « hex spells » par Jo Steen

Mut Danu propose dans son livre The Tree Mothers de travailler avec des « Hex spells ». Elle évoque notamment Jo Steen et donne ce lien qui pointait vers le site du Compost Coven.

Jo Steen (1930-1996) a été membre du Compost Coven de Starhawk et a transmis à ses élèves une riche palette de pratiques magiques pendant de nombreuses années. Pour elle, chaque geste pouvait devenir porteur de magie, dès lors qu’il était accompli avec intention. Elle avait une prédilection particulière pour les « hex signs », qu’elle animait d’une volonté précise. Au fil du temps, elle a constitué une collection de ces motifs traditionnels des Pennsylvania Dutch (une communauté germanophone installée en Pennsylvanie depuis le XVIIIᵉ siècle), qu’elle a ensuite enrichie de symboles africains et de talismans médiévaux. Plus tard, elle a créé des kits contenant ces motifs imprimés sur des feuilles, accompagnés d’instructions détaillées pour les colorier avec conscience.

Voici ma traduction de l’article en question.

Comment utiliser les « hex spells » :

Téléchargez et imprimez le sortilège que vous souhaitez réaliser.

  • En utilisant les correspondances des 4 ou des 7 (voir plus bas), choisissez les couleurs appropriées pour votre intention.
  • Travaillez toujours dextrogyre (dans le sens horaire) dans un but de croissance, et sénestrogyre (dans le sens anti-horaire) dans un objectif de décroissance.
  • Concentrez-vous pleinement sur votre intention pendant tout le temps où vous coloriez le sortilège : c’est un outil méditatif, semblable au yantra asiatique, mais il est aussi interactif, engageant à la fois le corps et l’esprit.
  • Ne débordez pas, autant que possible, la netteté a son importance !

Les sortilèges concernant l’intuition / la compréhension profonde / l’inspiration / la créativité et les progrès rapides nécessitent une étape supplémentaire : l’intuition, la progression, etc., s’orientent vers un but particulier. Vous devrez donc télécharger et imprimer les minihexen (voir plus bas, point #13), chacun devant s’intégrer parfaitement au centre du sort principal, afin de demander un progrès rapide dans les affaires de manifestation (un bon sortilège pour l’argent), ou un progrès rapide dans les questions de santé, et ainsi de suite.

Lorsque vous avez terminé, vous pouvez les accrocher à votre mur, les transformer en plaque, les faire reproduire sur un t-shirt ou un tapis de souris, les garder avec vous comme porte-bonheur… ou les offrir à quelqu’un à qui vous souhaitez du bien. Vous pouvez également utiliser ces motifs pour la broderie ou le point de croix (ce qui prend beaucoup plus de temps et demande beaucoup plus d’intention, rendant le sort plus puissant), pour décorer un gâteau d’anniversaire, tricoter un pull, comme modèle de tatouage : tout ce que votre cœur désire et ce que vos mains savent faire.

Les « hex spells »

[Les citations proviennent de l’ensemble imprimé des « Hex Spells » de Jo]

1. Abondance :

Ce symbole concerne l’abondance dans tous les domaines où vous pourriez en avoir besoin, pas seulement le domaine matériel.

📄 Télécharger Abondance (PDF)

2. Croissance :

Celui-ci peut également être utilisé avec les minihexen (mini « hex spells » voir plus bas, point #13) pour favoriser la croissance dans des domaines spécifiques. Veillez TOUJOURS à travailler dextrogyre, du centre vers l’extérieur, en formant une spirale de croissance.

[Jo disait : « Croissance (dans tout ce que vous désirez). La double spirale de croissance. Coloriez la figure en spirale, en travaillant dans le sens des aiguilles d’une montre, et vous accomplirez votre CROISSANCE. »]

📄 Télécharger Croissance (PDF)

3. Intuition, Inspiration et Créativité :

L’un des favoris de Jo. À utiliser avec les minihexen pour recevoir des éclairages dans la sphère de votre vie qui en a besoin.

[Jo disait : « La pluie qui rafraîchit l’âme : Intuition – Inspiration – Créativité. Un sortilège de magie verte. La pluie d’INSPIRATION traverse l’Arc-en-ciel de la PROMESSE pour venir irriguer l’ÉTOILE-TERRE. L’Étoile-Terre, avec  la fleur de l’Étoile-Terre CENTRÉE, tourne sans cesse, alternant nuit/jour, légèreté/lourdeur, etc. Coloriez dextrogyre pour favoriser la perspicacité/clarté/intuition, l’inspiration et la CRÉATIVITÉ. »]

4. Joie :

Assez évident… Utilisez des couleurs éclatantes et lumineuses, couvrant tout le spectre.

[Jo disait : « Voici la Fleur-Terre-Étoile, agencée pour susciter Joie et Bonheur. Le jaune clair, irradiant de lumière, est le point de départ. Ajoutez contraste et profondeur avec les tons riches et saturés de la terre : là où l’on trouve la joie. »]

📄 Télécharger Joie (PDF)

5. Le Temps des Lys :

Pour apporter la paix et le calme parmi les gens.

[Jo disait : « Le Temps des Lys. Dessinez et coloriez soigneusement en violet pour symboliser la noblesse. C’est un sortilège pour instaurer une ère de justice, de paix et d’amour parmi toutes les créatures, qui vivront comme des sœurs et frères. Dessinez-le souvent. »]

6. Chance en amour :

Pour donner un petit coup de pouce à votre romance.

📄 Télécharger Chance en Amour (PDF)

7. Manifestation :
Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas : manifester votre désir dans le monde. Très puissant.
[Jo disait : « Création–manifestation et matérialisation. “Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas.” Haut/bas, intérieur/extérieur, encerclé par la lemniscate, l’éternité liant toute vie ; flanqué des symboles Terre–Étoile, appelant la joie dans toutes les bonnes choses de la terre. Il s’agit d’une représentation symbolique du principe le plus fondamental de la magie sympathique. »]
8. Progrès rapide :
N’oubliez pas qu’un progrès rapide sans objectif précis ne sert à rien.
[Jo disait : « L’Étoile tourbillonnante – Progrès rapide. Placez l’un des symboles plus petits (minihexen) au centre de l’étoile pour un progrès rapide et judicieux, manifestant un changement dans la direction indiquée. »]
9. Sérénité :

Intérieure et extérieure.

[Jo disait : « Le Grand et les 7 Petits Sceaux de Sérénité. Utilisez du bleu pour la sérénité vigilante et protectrice de la création accomplie. Colorez ce sortilège en sept parties, ou sept étapes, ou voire sur sept jours : selon votre volonté, qu’il en soit ainsi / as you will, so mote it be. Étudiez la signification des feuilles. »]

📄 Télécharger Sérénité (PDF)

10. Voyage Sûr

Un ancien talisman du Moyen Âge. À porter sur soi lors des déplacements.

📄 Télécharger Voyage Sûr (PDF)

11. Amour Véritable

Pour trouver celui ou celle avec qui vous resterez.

📄 Télécharger Amour Véritable (PDF)

12. Réparez vos Erreurs

Un des favoris de Jo. Vous pouvez TOUJOURS réparer vos erreurs.

[Jo disait : « Ayez Foi ! Vous pouvez toujours réparer vos erreurs. Sortilège trois-en-un. Deux parties africaines. Une partie HEX spell. Il rendra votre foyer sûr, remplira votre cœur de confiance, et vous donnera le courage de recommencer. »]

📄 Télécharger Annuler Vos Erreurs (PDF)

13. Mini-sorts Hex à utiliser au centre de l’IIC (Intuition, inspiration, créativité) ou du Progrès Rapide

📄 Télécharger Mini-sorts Hex (PDF)

Correspondances des 4 (directions)

Direction Est Sud Ouest Nord
Pierres opale blanche, topaze cornaline, opale mexicaine, héliotrope, rubis émeraude, opale triplet, saphir, aigue-marine agate mousse, opale matricielle
Bois frêne, bouleau pin, cèdre saule, aulne sorbier, sureau
Huiles santal, lavande, cannelle laurier, camomille, clou de girofle, patchouli romarin, myrrhe, gaulthérie rose, iris, musc, menthe, jasmin
Sabbat Eostre (Équinoxe de printemps) Litha (Solstice d’été) Mabon (Équinoxe d’automne) Yule (Solstice d’hiver)
Saison Printemps Été Automne Hiver
Élément Air Feu Eau Terre
Outil Athamé Baguette Calice Pentacle
Couleur Jaune Rouge Bleu Vert
Moment du jour Aube Midi Crépuscule Minuit
Partie du corps Souffle Aura Sang Chair & Os
Animal Aigle Lion Serpent Taureau
Attribut Joie Puissance Fécondité Sécurité
Mental Intellect Intuition Émotion Sensation
Alchimie Évaporation Combustion Solution Fixation
Étape de vie Naissance Croissance Mort Décomposition
Âge Enfance Jeunesse Maturité Vieillesse
Pouvoir de la sorcière Imagination Volonté Foi Secret

Correspondances des 7 (planètes)

PLANÈTE Soleil Lune Mars Mercure Jupiter Vénus Saturne
JOUR Dimanche Lundi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi Samedi
RÈGNE SUR Ego, renommée, extraversion, individualité, esprit conscient, joie, succès, avancement, leadership, pouvoir naturel, amitié, croissance, guérison, lumière Émotions, psychisme, intuition, esprit subconscient ; femmes, cycles, naissance, génération, inspiration, poésie, voyage (surtout par l’eau), mer et marées, fertilité, pluie, secrets, rêves, magie et glamour, tromperie Corps physique, chaleur, actions, agressivité, pouvoir, énergie, athlétisme ; force, lutte, guerre, conflit, confrontations physiques d’amour ou de haine, malédictions explosives, guérison des blessures Intellect, rapidité, messages, dualité, jeunesse, communications, intelligence, astuce, créativité, science, mémoire, transactions commerciales, vol, apprentissage Expansion, argent, possessions matérielles Amour, harmonie, esthétique, amitié, confort et luxe, gain matériel Constriction, ordre, règles, pessimisme, mort, froid, discipline, obstacles, limitations, liens, savoir, bâtiments, histoire, temps, changements longs et lents, vieillesse, sagesse de l’expérience
COULEUR Orange Blanc Rouge Jaune Violet Bleu-vert Noir
MÉTAL Or Argent Fer Mercure Étain Cuivre Plomb
PIERRE  Topaze Pierre de lune Héliotrope Opale de feu Améthyste Émeraude Obsidienne

* Les Pennsylvania Dutch sont les descendants actuels de plusieurs vagues d’immigrants germanophones venus d’Europe à partir de la fin du XVIIᵉ siècle et jusqu’à la période de la Révolution américaine, et peu après. Ils venaient principalement d’Allemagne centrale et occidentale (Rhénanie-Palatinat, Hesse rhénane, Bade-Wurtemberg), de régions germanophones de Suisse, d’Alsace (aujourd’hui en France), et de Silésie (aujourd’hui en Pologne et République tchèque). Ils étaient majoritairement agriculteurs, fuyant les guerres, troubles économiques et persécutions religieuses.

Photo : ?

[La Déesse Blanche] G pour GORT

G pour GORT

Les Mythes Celtes, la Déesse Blanche par Robert Graves. Pages 210-212.

Le onzième arbre est le lierre à l’époque de sa floraison. Octobre était la saison des Bacchanales de Thrace et de Thessalie pendant lesquelles les Bassarides couraient comme des sauvages à travers les montagnes en agitant les branches de sapin de la reine Artémis (ou Ariadne). Les branches, mêlées à du lierre, à fruits jaunes, étaient disposées en spirales. Le lierre était employé en l’honneur de Dionysos, le Dionysos d’automne, qu’il faut distinguer du Dionysos du solstice d’hiver, lequel est, en réalité, un Héraclès. Ils s’étaient tatoué un chevreuil sur leurs bras droits au-dessus du coude. Dans leur fureur sacrée, ils mettaient en pièces faons, chevreaux, enfants, voire même des hommes. Le lierre était consacré à Osiris aussi bien qu’à Dionysos. Vigne et lierre se rejoignent à ce tournant de l’année et symbolisent ensemble la résurrection, sans doute parce que ce sont là les deux seuls végétaux du Beth-Luis-Nion qui poussent en spirales. Si la vigne symbolise la résurrection, c’est aussi parce que sa force est transmise par le vin. En Angleterre, les rameaux de lierre ont toujours servi d’enseignes aux débits de vin, d’où le proverbe : « Bon vin se passe de lierre » et l’on brasse encore une bière de lierre, breuvage médiéval hautement toxique, au Trinity College d’Oxford en mémoire d’un étudiant de ce collège assassiné par les hommes de Balliol.

Il est probable que la boisson des Bassarides était la bière de sapin, brassée à partir de la sève de l’épicéa et assaisonnée de lierre ; à moins qu’ils ne mâchassent des feuilles de lierre pour leur effet de drogue. Cependant, le principal élément toxique de la drogue des Ménades a pu être l’amanita muscaria, le « tabouret de crapaud », champignon tacheté de points blancs qui seul peut fournir la force nécessaire.

Ici nous devons reconsidérer Phoronée, le Dionysos du printemps, inventeur du feu. Il bâtit la cité d’Argos dont l’emblème, selon Apollodore, était un crapaud ; de même Mycènes, la principale forteresse de l’Argolide, aurait été ainsi appelée, à en croire Pausanias, parce que Persée, un converti au culte de Dionysos, aurait trouvé un « tabouret de crapaud » poussant sur le site. Dionysos avait deux fêtes :

  • au printemps, l’Anthestérion ou « Éclosion des Fleurs »,

  • et, à l’automne, le Mystérion, qui signifie probablement « Éclosion des Champignons » (Mykostérion), auxquels on donnait encore le nom d’ambroisie (« nourriture des dieux »).

Fut-ce Phoronée qui découvrit également un feu divin résidant dans ce champignon, ou bien fut-ce Phrynée (« l’Être-Crapaud ») ? L’amanita muscaria, bien qu’elle ne soit pas un arbre, pousse sous un arbre : toujours un bouleau dans le Nord, depuis la Thrace et les pays celtiques jusqu’au cercle arctique ; mais sous un sapin ou un pin dans le Sud de la Grèce ainsi que de la Palestine à l’équateur. Dans le Nord, elle est rouge ; dans le Sud, elle est fauve. Et ceci n’expliquerait-il pas la préséance accordée à l’épicéa parmi les voyelles en tant que A et au bouleau parmi les consonnes en tant que B ? Cela pourrait-il apporter un supplément d’information au sujet de l’énigme sur le « Christ fils d’Alpha » ?

La rivalité entre le houx et le lierre, mentionnée dans les poèmes médiévaux, n’est pas, comme on pourrait le supposer, celle qui pourrait exister entre l’arbre du meurtre et celui de la résurrection, entre Typhon-Seth et Dionysos-Osiris ; nullement : elle symbolise la guerre domestique entre les sexes. L’explication semble en être que, dans certaines parties de l’Angleterre, la dernière gerbe de la moisson à être charriée dans une paroisse quelconque était liée avec le lierre osirien et appelée le Mai de la Moisson, la Fiancée de la Moisson ou la Fille du Lierre : c’était au dernier fermier à rentrer sa moisson qu’il incombait de donner la Fille du Lierre en pénalité, présage de mauvais sort jusqu’à l’année suivante. C’est ainsi que « lierre » en vint à signifier « mégère » ou épouse acariâtre : le lierre étrangle les arbres, ce qui confirme la comparaison.

Mais le lierre et le houx étaient tous les deux associés aux saturnales, le houx étant la canne de Saturne, le lierre étant le nid du roitelet à cimier doré, son oiseau. Le matin de Noël, le dernier de son joyeux règne, le premier pied à franchir le seuil était censé être celui du représentant de Saturne, évoqué comme un homme sombre nommé le Gars du Houx, et l’on prenait de sérieuses précautions pour tenir les femmes hors de son passage. Ainsi donc la Fille du Lierre et le Gars du Houx en vinrent à s’opposer, ce qui donna naissance à la coutume de Noël selon laquelle les garçons du lierre et les filles du lierre jouaient aux gages pour obtenir la préséance et chantaient des chansons, surtout satiriques, à l’adresse les uns des autres. Le mois du lierre s’étend du 30 septembre au 27 octobre.

Une interview d’une faerie queen

Il s’agit d’un épisode du podcast (anglophone) Southern Fried Witch, durant lequel l’animatrice du Sud des États-Unis s’entretient avec Linda Kerr, grande prêtresse de la Faerie Faith et pionnière du paganisme en Alabama. Ensemble, elles évoquent la création de la communauté païenne locale et la manière de vivre sa spiritualité dans une région profondément chrétienne. L’épisode, publié le 28 janvier 2021, offre un témoignage intéressant sur la vie spirituelle alternative du Sud, mêlant sagesse, humour et amour de la nature.

Dans cet épisode du podcast Southern Fried Witch, l’animatrice rencontre Linda Kerr, figure majeure du paganisme en Alabama, grande prêtresse de la Faerie Faith et ancienne élève d’Epona.

Engagée dans la communauté, elle a fondé plusieurs initiatives païennes, dont les festivals Moon Dance et FallFling, ainsi que Church of the Spiral Tree CST, une église païenne non lucrative et ouverte à toutes les traditions, et la Sacred Grove Academy, une école favorisant l’instruction à domicile dans un esprit païen, hors cadre chrétien ou laïc.

Linda Kerr y présente la Faerie Faith, qu’elle décrit davantage comme une philosophie de vie, plutôt que comme une religion à proprement parler.

Pour Linda, la pratique doit rester libre, sans dogmes ni divinités imposées, chacun adaptant son chemin selon son évolution personnelle. D’ailleurs, elle se dit agnostique, voire athée, considérant la nature comme une entité vivante et « presque » consciente, mais rejetant les notions de destin ou de karma. Pour elle, la magie réside dans la capacité à façonner sa propre réalité.

Sa vision d’une spiritualité autonome, évolutive et enracinée dans le vivant fait de cet entretien un témoignage plutôt rare et inspirant du paganisme contemporain du Sud des États-Unis.

Voici le lien direct de l’interview vers le blog :  https://southernfriedwitch.com/podcast/s2e6-interview-with-a-queen-an-alabama-pagan-heretic

Spiniensis : le dieu des épines dans la Rome antique

En explorant les symboles de ce mois dans notre système Faerie Faith, j’ai découvert un dieu un peu particulier, qui parlera sans doute à tout détenteur de jardin en friche, envahie par les ronces ;o)

Dans la religion romaine ancienne, chaque aspect de la vie quotidienne pouvait être associé à une divinité spécifique. Parmi ces dieux mineurs se trouvait Spiniensis, dont le rôle était lié aux épines et aux buissons épineux.

Son nom vient du latin spina, qui signifie « épine ».

Spiniensis semble avoir été invoqué principalement par les paysans lors de travaux agricoles, notamment pour défricher les champs ou éliminer les buissons épineux qui gênaient les cultures. Les Romains croyaient que cette divinité pouvait faciliter ces tâches et protéger leurs terres contre les nuisances causées par les épines.

Sa mention apparaît notamment chez Saint Augustin dans La Cité de Dieu, où le philosophe critique la multiplicité des divinités romaines, soulignant l’étrangeté d’invoquer un dieu pour une tâche aussi spécifique que l’arrachage des épines. Pour Augustin, une divinité unique et bienveillante suffirait à protéger l’homme de tous les maux.

« Encore une fois, qu’était-il nécessaire, pour obtenir les biens de l’âme ou ceux du corps, ou les biens extérieurs, d’adorer et d’invoquer cette foule de dieux que je n’ai pas tous nommés, et que les païens eux-mêmes n’ont pu diviser et multiplier à l’égal de leurs besoins, alors que la déesse Félicité pouvait si aisément les résumer tous ? Et non seulement elle seule suffisait pour obtenir tous les biens, mais aussi pour éviter tous les maux ; car à quoi bon invoquer la déesse Fessonia contre la fatigue, la déesse Pellonia pour expulser l’ennemi, Apollon ou Esculape contre les maladies, ou ces deux médecins ensemble, quand le cas était grave ? à quoi bon enfin le dieu Spiniensis pour arracher les épines des champs, et la déesse Rubigo pour écarter la nielle ? La seule Félicité, par sa présence et sa protection, pouvait détourner ou dissiper tous ces maux. Enfin, puisque nous traitons ici de la Vertu et de la Félicité, si la Félicité est la récompense de la Vertu, ce n’est donc pas une déesse, mais un don de Dieu ; ou si c’est une déesse, pourquoi ne dit-on pas que c’est elle aussi qui donne la vertu, puisque être vertueux est une grande félicité ? »

Peut-être que saint Augustin aurait été moins catégorique s’il avait eu à défricher un champ de ronces en sandales ;o)

Spiniensis faisait partie des indigitamenta, une liste de divinités officielles dans la religion romaine, supervisée par le Collège des Pontifes pour s’assurer que les bons noms divins étaient invoqués dans les prières publiques. Même si cette divinité est peu documentée, elle témoigne de la richesse et de la diversité du panthéon romain, qui comprenait des dieux pour les aspects les plus précis de la vie quotidienne.

Sources :

Illustration : Brian Froud, Goblin and Knight on White Horse Fantasy Illustration, 1976.

La fée des ronces (aime bien picoler)

Durant le prochain mois lunaire, qui débutera le 21 septembre, juste avant l’équinoxe d’automne cette année (22 septembre), nous célébrerons la vigne et la ronce. Pour bien commencer, voici un peu de folklore sur les fées, qui rapproche nos deux alliées végétales et explique bien des choses ;o)

Dans les Alpes, une fée à qui l’on avait fait boire du vin et qui s’était retrouvée toute guillerette demanda aux gens ce qu’était cette fabuleuse boisson.

Par crainte de voir le vin gâché et la vigne punie si la question de la fée cachait sa colère d’avoir été soûlée, les pauvres vignerons désignèrent la ronce.

La fée, croyant alors bien faire, pour récompenser la noble plante qui donnait un jus si délicieux, la dota d’une qualité magique : partout où elle touchera terre, elle prendra racine.

C’est depuis lors que la ronce, et malheureusement non la vigne, pousse et repousse de partout !

Source : ?

Illustration : Une petite fée mignonne et un peu tarte :) « The Blackberry Fairy », Cicely Mary Barker.

Courir avec Artémis, par Mut Danu

Note de Fleur de Sureau : Ce texte, intitulé Running with Artemis, est signé Mut Danu. Je l’avais gardé précieusement dans les brouillons du blog, avec l’envie de le traduire un jour pour le coven (Mut Danu étant notre aînée dans la tradition et nous apprécions tous son travail). À l’époque, on pouvait encore le retrouver en ligne, mais il ne semble plus disponible aujourd’hui. Je me suis permise de le traduire, de l’adapter et de le publier ici (en espérant ne pas manquer de délicatesse ce faisant). Pour ce mois d’études, mes recherches m’ont amené à lire beaucoup sur Artémis, la mythologie et l’histoire de la Grèce antique. Ce texte résonne bien plus clairement aujourd’hui pour moi et c’est la raison pour laquelle j’ai eu envie de le traduire. J’ai notamment ressenti un certain… désenchantement (?) en découvrant les enjeux politiques et sociaux qui se cachaient derrière les chœurs de jeunes filles dans les temples d’Artémis.

Courir avec Artémis*

« Libre !
Dans la verdure, dans la clairière joyeuse, bondissant telle une biche qui ne craint aucun chasseur.
Là, je danserai sans que nul homme ne me regarde
Là, je trouverai la sagesse inscrite dans les ombres de la forêt.
Existe-t-il un don plus grand que de ressentir une telle joie ? »

Chant d’une Ménade, extrait des « Bacchantes », d’Euripide**.

Tenter de me rapprocher d’Artémis, c’était parfois comme courir après la Déesse, les bottes alourdies par la boue. Elle se tenait là, loin devant, belle, puissante, et pourtant je ne parvenais pas à la distinguer nettement. Tant d’obstacles sur la route ! En explorant la mythologie, j’ai découvert des millénaires de messages brouillés, issus de nombreuses cultures : certaines l’aimaient tant qu’elles voulurent l’intégrer à leur culte local, à leur propre déesse. Et puis il y avait les autres. Les écrits classiques étaient imprégnés de la culture souvent misogyne de la Grèce antique ; puis vinrent la lecture déformée et l’idéologie patriarcale de l’ère chrétienne. Pour vraiment la voir, il fallait lire entre les lignes, et faire appel à beaucoup d’intuition.

Voici ce que me souffle mon intuition… Qu’il me faut gratter la boue de mes bottes, ou mieux encore les abandonner et courir pieds nus, trouver une manière de courir avec Artémis… mère du sauvage, des bêtes indomptées, du toi sauvage et du moi sauvage. Comment les Amazones couraient-elles aux côtés d’Artémis ? Quelle était la résonance de leurs chants, quels rythmes battaient leurs tambours lorsqu’elles l’honoraient ?

Si seulement les chants, les rites et les arts des Amazones nous avaient été transmis avec soin… S’ils avaient survécu aux flammes, aux guerres et aux caprices des modes, quel trésor ce serait pour nous qui vivons aujourd’hui !
Ce qui a traversé le temps, ce sont des mythes et des légendes, souvent rédigés par d’autres. De grands temples ont traversé les âges jusqu’à ce que l’histoire en soit consignée par écrit, et aujourd’hui, nous pouvons les relire à travers le regard des femmes***. Je pleure la perte des récits à la première personne, mais une note d’espoir demeure : les légendes nous sont parvenues – incomplètes, certes, mais nous pouvons les reconstituer et lire entre les lignes. Les chercheurs peuvent réévaluer les théories anciennes.
Et nous, nous pouvons ressentir, plonger au plus profond de notre mémoire ancestrale et de notre intuition pour y trouver des réponses : communiquer à travers le temps avec nos mères antiques, dans les temples.

Bien avant que nous ne lui ayons donné un nom, elle était déjà la Mère Sauvage. Au Paléolithique et au début du Néolithique, tout était sauvage, et nous étions en plein cœur de cette sauvagerie. La distinction entre le « sauvage » et le « civilisé » n’existait pas encore. Nous n’avions pas encore commencé à domestiquer les animaux ni les plantes, et nous, enfants humains, n’étions pas séparés de ses autres enfants. À cette époque, nous savions que la Mère donnait tout et reprenait tout : elle offrait nourriture, animaux et plantes, puis reprenait après. La chasse n’était pas un massacre de masse, mais la réception d’un don, celui de la Mère et de l’esprit de l’animal, qui, après la mort, retournait vivre auprès d’elle. Le rituel est né comme un réenactement du cercle vie-mort-vie. La vie était circulaire, saisonnière, à l’image de la Mère.

Puis les choses se sont accélérées, et le flux du Temps s’est mis à couler dans une seule direction : en ligne droite, bien sûr… Les arts créatifs sacrés, comme la poterie et le tissage, ont commencé à se fabriquer en masse ; le commerce est né, suivi des échanges et des migrations. Peuples, tribus et leurs animaux domestiques se sont mis en marche, découvrant de nouveaux territoires, luttant pour les ressources et repoussant les populations autochtones. Tout cela a commencé il y a plus de 5 000 ans, et bien que nos techniques modernes soient plus destructrices et que nous soyons des milliards de plus, le patriarcat n’a en réalité inventé aucune nouvelle méthode de conquête. (Il ne fait que détruire plus rapidement.)

Et pourtant ! Au cœur de ce nouveau monde de vacarme et de confusion, Artémis continuait de répandre sa promesse d’abondance, comme le lait débordant des seins d’une mère. Il semble que les premières mentions du culte d’Artémis soient celles qui parlent des Amazones, qui auraient apporté son culte de la Macédoine et de la Thrace jusqu’à Éphèse. L’image qui nous est parvenue de cette facette de la déesse est celle d’Artémis d’Éphèse, Polymastos, la Déesse aux multiples seins. Elle incarne la puissance nourricière et généreuse de la nature, déesse du lait et du miel. Son corps était couvert de seins et de reliefs sculptés représentant des animaux. Ses pieds se rejoignaient en une posture pointue, qui semble faire écho à notre ancienne Grande Déesse des cavernes, dont les pieds effilés pouvaient s’enfoncer dans la terre meuble.

Les Arcadiens ont érigé des temples dédiés à Artémis partout dans cette région de la Grèce antique. Ils la percevaient autrement : comme la jeune Maîtresse indépendante des Animaux, et c’est cette image que son nom évoque encore pour la plupart d’entre nous. C’est à ce moment que les couches patriarcales commencent à recouvrir cette image. Une grande partie de nos représentations mentales d’Artémis a été façonnée par Homère dans l’Iliade, par Callimaque et par Nonnos. Des couches supplémentaires ont ensuite été ajoutées par les peintres de cour européens du XVIIIe siècle, qui ont réalisé des fresques murales et des œuvres d’art séculières à grande échelle inspirées des mythes grecs et romains redécouverts.

Nos ancêtres l’ont réellement portée avec eux à travers tout le bassin méditerranéen. La Grande Déesse Artémis était vénérée depuis les rivages de l’Anatolie (l’actuelle Turquie) jusqu’à la côte ibérique (l’actuelle Espagne), au nord jusqu’en Thrace (Bulgarie), au sud jusqu’en Afrique du Nord. Partout où elle allait, son nom reflétait les peuples qui l’adoraient. Elle devenait alors Diane, Artémis-Britomartis-Dame des Filets, Artémis Ephesia, Artémis Némétona, Titanis Phoibe, et tant d’autres.

Au fil des millénaires, elle a été transformée par des cultures davantage intéressées par un Dieu-père tout-puissant que par une Déesse-mère. Artémis fut alors considérée comme une enfant de Zeus, son droit à conserver sa virginité lui étant accordé par lui. Sa passion était la chasse plutôt que la protection de la faune, et sa silhouette était décrite comme “grande et masculine”. Les prêtres de ses temples exigeaient des sacrifices sanglants. Elle était grande et redoutée, et les gens la percevaient selon le contexte de leur époque, leurs besoins politiques et leurs tendances religieuses.

Ainsi se déroule l’expérience humaine de la Déesse. La Grande Déesse du Paléolithique et du Néolithique, dans l’image comme dans l’esprit, a été remodelée et soumise par le raz-de-marée de la culture patriarcale. Pourtant, elle est toujours restée, Dame des Choses Sauvages, trop puissante pour disparaître, trop sauvage pour être domestiquée. C’est cette Artémis Sauvage, éternellement libre, Déesse des Amazones, Mère du Lait et du Miel, qui peut nous apprendre ce que cela signifie d’être une Femme Sauvage… ou un Homme Sauvage.

On peut considérer qu’Artémis n’influence que trois sphères de nos vies : la fin, le milieu et le commencement ! Artémis était connue pour offrir une fin sacrée à la vie, et les femmes en particulier l’invoquaient pour qu’elle décoche ses flèches, leur permettant de bénéficier d’une “mort rapide”. En tant que sage-femme divine, les nouveau-nés étaient sous sa protection. Mais ce qui paraît le plus fascinant, c’est de pouvoir connaître cette déesse dans l’espace entre le commencement et la fin.

Les animaux sauvages et féroces devenaient dociles en présence d’Artémis. La nature est son élément, et elle est sauvage, aussi les animaux percevaient-ils ce lien. Nous avons nous aussi une nature sauvage. Lorsque nous nous retrouvons coincés dans un travail oppressant, ou lorsque nous nous rebellons contre un mode de vie trop rigide ou des attentes trop strictes à notre égard, c’est notre moi sauvage et naturel qui frappe contre les barreaux de sa cage, ou qui ronge sa propre patte pour tenter de s’échapper. Il peut être nécessaire de changer de travail, de relation ou de mode de vie pour plier les barreaux suffisamment et se faufiler dehors. Il se peut que tu doives renoncer à quelque chose de précieux, mais c’est possible. Cela demande du courage et une écoute attentive de ton animal intérieur. Une fois libéré·e, ton esprit peut courir, s’étendre, explorer, et tu auras la capacité d’apprivoiser n’importe quel environnement, qu’il s’agisse d’un désert ou d’une jungle urbaine.

Il existe une sauvagerie en chaque femme, qui peut et doit être explorée… As-tu entendu parler des Ménades ?

Méprisées, considérées comme des « folles », des « hystériques »… eh bien, évidemment qu’elles l’étaient ! Ne devenons-nous pas tous fous à force de nous contraindre à être trop civilisés, trop longtemps ?
Longtemps reléguées au domaine du mythe, les Ménades étaient des femmes bien réelles, vivantes, qui avaient compris que la « démocratie » de la Grèce classique n’était en réalité qu’une bonne affaire pour les hommes blancs et libres. Les femmes partirent. Pour de courtes périodes, ou peut-être pour toujours, elles quittèrent la « civilisation » et allèrent vivre dans les lieux sauvages. Artémis était leur déesse, Dionysos, leur dieu hermaphrodite. En sécurité dans les forêts montagneuses, les femmes dansaient de manière extatique, avec la joie de la vraie liberté. La rumeur se répandit dans toute la campagne : qu’aucun homme n’ose troubler ces femmes, sous peine d’être mis en pièces ! Des groupes de femmes se formèrent dans toute la Grèce antique et furent mentionnés par les auteurs de l’époque, parfois favorablement, souvent non. Elles furent laissées en paix.

Les femmes doivent puiser dans cette sagesse ancienne de nos aïeules qui vénéraient Artémis. Nous avons besoin de temps rien que pour nous ! À aucune époque de l’histoire les femmes n’ont été aussi isolées qu’aujourd’hui. Autrefois, même dans la mémoire vivante, les femmes passaient beaucoup plus de temps ensemble. Dans l’histoire américaine, il y avait les cercles de couture, de patchwork, de cuisine collective et bien d’autres moments communautaires pour partager nos histoires. En Europe, chaque village avait un lavoir commun, où les femmes frottaient les vêtements et résolvaient en même temps de nombreux problèmes. Depuis l’ère industrielle, lorsque les femmes ont massivement rejoint les usines et les bureaux, on a ressenti le besoin de contrôler leur travail. Mais être ensemble au travail ne signifie pas nécessairement que nous partagions quelque chose de positif. Être ensemble en dehors du travail est suspect. Cela rend les maris et les petits amis nerveux. Mais être ensemble pour le plaisir, c’est exactement ce dont nous avons besoin. Un peu de liberté, et nous aussi commencerons à danser de manière extatique. Qu’ils transpirent un bon coup !

Il y avait, et il y a, des hommes aimant les Déesses qui ont suivi Artémis. Les hommes de la Grèce antique ne pouvaient imaginer que les femmes faisaient autre chose que s’adonner à un sexe débridé hors mariage… alors ils ont inventé les “satyres”. Mais il est probable que les femmes n’étaient pas dans les bois à faire des orgies avec des satyres : elles voulaient simplement qu’on les LAISSE TRANQUILLES. Pourtant, l’intuition suggère qu’il y avait aussi des hommes vivant dans les lieux sauvages. Des hommes qui ne voulaient pas vivre comme des esclaves, qui n’appartenaient pas à la classe privilégiée par la démocratie, et qui n’étaient pas non plus des ermites ayant rejeté la civilisation pour la nature sauvage. Les hommes féministes vivant dans notre monde moderne peuvent parfois rencontrer plus de difficultés que les femmes. Comme Dionysos, ce sont des Fils de la Mère. Ils sentent en eux la présence du Féminin Divin. La culture dominante ne soutient certainement pas les hommes qui ont quoi que ce soit à voir avec le Féminin sacré. Des traîtres !… Et même les femmes féministes ne savent pas toujours quoi penser de ces hommes. Peut-on leur faire confiance ?

Nous devrions ! Nous devrions leur faire confiance et les encourager à chercher la Déesse si c’est là que leur cœur les mène. C’est lorsque nous courons tous avec la Déesse, sauvages, libres, que nous goûtons à la joie. (Même si ce n’est que pour quelques heures le week-end !) Quand nous dansons pieds nus et courons avec abandon, nous pouvons puiser dans cette énergie joyeuse et l’insuffler dans notre vie quotidienne.

Maintenant, cesse de courir.
Ce que tu cherches est ici.
Écoute.
Écoute ton cœur qui bat à toute vitesse,
écoute vraiment.

Artémis murmure :

« Si tu veux venir avec moi alors…
dépasse le faire,
et entre dans le Vivant. » »

« Si tu veux venir avec moi alors…
Cesse de t’égarer dans les gestes, les routines ou le tumulte ;
et fais l’expérience sacrée de la Vie. »

Mut Danu, grande prêtresse Apple Branch, une tradition dianique. Solstice d’hiver 2007.

« Running with Artemis » by Mut Danu. The Oracle Magazine Winter Solstice, 2007.

Notes :

* Courir avec Artémis est une allusion aux Héraia.  https://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9raia

** Je n’ai trouvé ce texte qu’à un seul endroit sur le net : https://moongoddess14.tripod.com/id4.html
Poème d’ouverture d’Euripide, vers 480 av. notre ère, « Les Bacchantes ».

*** La phrase « Great Temples survived into recorded history, and now herstory » contient un jeu de mots subtil entre “history” et “herstory”.  “History” signifie l’histoire telle qu’on l’a traditionnellement écrite, souvent centrée sur les hommes. “Herstory” est un terme inventé pour mettre en avant l’histoire des femmes, ou l’histoire racontée du point de vue féminin. Donc, l’idée est que les grands temples ont survécu jusqu’à l’époque où l’histoire a été consignée par écrit (recorded history), le principe de l’histoire, et qu’aujourd’hui, nous pouvons les reconsidérer à travers une perspective féminine.

Du quartz aux esprits des profondeurs, les kobolds

Puisque ce mois-ci, dans notre tradition, le quartz est à l’honneur, j’ai commencé quelques recherches qui m’ont conduite… aux kobolde ! C’est irrésistible, il me faut donc en parler.

Quartz, zwerg et kobold : une étymologie enchantée

Le mot quartz proviendrait de l’allemand quarz, utilisé depuis le Moyen Âge dans les régions minières. Il est introduit en français au XVIIIe siècle, d’abord sous la forme quertz, puis quartz.

Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer l’origine de ce mot. Parmi celles-ci, nous trouvons le mot querg, une ancienne forme de zwerg, c’est-à-dire « nain » en allemand, en référence aux créatures des mines souterraines appelées Kobolde. Vous noterez que ces êtres ou génies ont également inspiré le nom du cobalt, mais j’y reviendrai.

Esprit des montagnes, kobolde & nains

Dans les traditions germaniques, le kobold et le nain ont progressivement été assimilés. Cette assimilation s’explique par le fait qu’ils partagent le même habitat.

À l’origine, le kobold est un esprit domestique ou souterrain, parfois bienveillant, parfois malicieux, lié à la maison ou aux mines. Le nain est plutôt une créature mythologique associée aux profondeurs de la terre, aux métaux et aux savoirs secrets. Mais leur habitat commun (les pierres, les grottes, les galeries) a favorisé un glissement entre les deux figures.

Dès le XVIe siècle, les kobolde sont décrits comme des « mineurs » (surnaturels), tout comme les nains. Ils deviennent des esprits des mines, gardiens ou perturbateurs des filons.

Cette assimilation reflète une évolution des croyances : les distinctions entre les types d’esprits s’estompent, et les figures se fondent dans un imaginaire commun où la pierre est vivante, habitée, et parfois capricieuse.

Le kobold, génie domestique ou esprit des profondeurs

Le kobold est une figure du folklore germanique, généralement décrite comme un esprit domestique ou souterrain. Le mot Kobold dérive probablement de kobe (pièce, chambre) et walten (régner), ce qui en ferait littéralement un « maître de la maison » ou pour le dire autrement un esprit tutélaire du foyer. À l’origine, il ne désigne pas un être vivant, mais une figure sculptée en bois ou en cire, à laquelle on faisait des offrandes de nourriture à certaines périodes de l’année.

Explorons maintenant les deux facettes principales de cette créature ambivalente.

Génie domestique

Dans les foyers, le kobold est perçu comme un esprit protecteur, capable d’apporter prospérité et ordre, à condition d’être respecté. Il peut aussi se montrer malicieux, voire destructeur, si on le néglige ou l’offense. Les récits populaires le décrivent souvent comme invisible, bien qu’il puisse se manifester par des bruits, des déplacements d’objets ou des apparitions fugaces.

Kobold des mines

Dans les régions minières, le kobold devient un esprit souterrain, gardien des trésors enfouis et des filons.

La nature du kobold est double. Il peut être bienveillant, aidant les mineurs à trouver des filons ou à éviter les dangers. Mais il peut aussi se montrer malicieux, provoquant des accidents, des éboulements ou des suffocations, souvent interprétés comme des punitions pour avoir manqué de respect ou transgressé des règles implicites.

Les mineurs, notamment des montagnes du Harz, en Allemagne, le tenaient pour responsable de la disparition de minerais précieux ou de la transformation de gisements en substances inutiles. Ils utilisaient le terme Kobold-Erz, c’est-à-dire « minerai du kobold », pour désigner certains minerais qui semblaient prometteurs, mais qui ne produisaient pas de métal utile à l’extraction. Ces minerais contenaient en réalité du cobalt, souvent associé à de l’arsenic et du soufre, ce qui les rendait toxiques et inutilisables avec les techniques de l’époque. Ce mythe est à l’origine du nom du cobalt.

Le kobold est ainsi lié à la croyance selon laquelle les esprits des montagnes pouvaient « voler » le minerai ou le rendre invisible, « transformer » des pierres précieuses en quartz sans valeur ou cacher les minerais aux mineurs. Les mineurs l’accusaient d’avoir ensorcelé la roche. Ce mythe trouve un fondement géologique : la teneur en minerai d’une roche diminue souvent lorsque la proportion de quartz augmente.

Esprit des pierres

Dans la mythologie germanique, les pierres sont considérées comme des lieux habités par des esprits : nains, elfes, kobolde et génies tutélaires y résident ou y veillent. Elles sont perçues comme des seuils vers l’invisible, parfois sacrées, parfois dangereuses.

Un jour que le roi Sveigdir rentre d’une beuverie, il aperçoit un nain assis au pied d’une pierre, qui l’invite à le suivre ; tous deux entrent dans la pierre, et le roi ne revint jamais plus.

Extrait de Démons et génies du terroir, Claude Lecouteux.

L’apparence du kobold

Les kobolde sont la version allemande des knockers domestiques (britanniques). Il ne sont pas particulièrement serviables. Ils sont plutôt enclins aux farces et aux espiègleries. Ils chasseraient volontiers les mineurs s’ils menaçaient de détruire leur ouvrage. Pourtant, il leur arrive parfois d’être étonnamment utiles. Illustration : Brian Froud.

Je ne sais pas vous, mais moi j’ai très envie de savoir à quoi ressemblerait un kobold, n’ayant jamais eu la chance ou la malchance d’en croiser, dans ce monde ou le suivant. Après quelques recherches, il serait de petite taille, son habitat serait donc souterrain ou domestique. Son  comportement serait ambivalent, comme nous l’avons vu. Il pourrait se rendre invisible et il serait métamorphe. Parfois entendu, mais rarement vu. Dans certaines œuvres modernes, le kobold est parfois représenté avec une houppelande sombre, un bonnet rouge ou une lanterne, voire une bougie sur le bonnet, comme un veilleur des galeries. Ces représentations sont savoureuses. Le travail de Brian Froud et celui de Jean-Baptiste Monge sont particulièrement remarquables.

Du culte à la fiction

La figure du kobold illustre le passage des croyances païennes vers le récit populaire : d’abord associé à un culte domestique, il devient personnage de fabliau, relégué à la fiction. Pourtant, sa présence dans les contes et légendes témoigne de la persistance d’une culture préchrétienne. Aujourd’hui, cette figure perdure à travers des œuvres contemporaines, où elle continue d’incarner le mystère des profondeurs et l’ambivalence des esprits anciens.

Eh ! Rien d’étonnant, finalement, à ce que le quartz m’ait menée aux kobolde.

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Illustrations :

Bibliographie :

  • Bächtold-Stäubli, Hanns. Kobold, in Handwörterbuch des deutschen Aberglaubens (HDA). Étude approfondie sur les origines, fonctions et variantes régionales du kobold dans le folklore germanique.
  • Grimm, Jacob. Deutsche Mythologie. Göttingen : Dieterich, 1835. Ouvrage de référence sur les croyances populaires et les figures mythologiques germaniques.
  • Lecouteux, Claude. Démons et génies du terroir au Moyen Âge. Paris : Imago, 1995.
  • Lecouteux, Claude. Les nains et les elfes au Moyen Âge. Paris : Imago, 2002.
  • Lecouteux, Claude. Les Esprits de la maison. Paris : Imago, 2005.
  • Mannhardt, Wilhelm. Wald- und Feldkulte. Untersuchungen zur Geschichte der deutschen Mythologie. Berlin : Borntraeger, 1875.

Ressources en ligne :

Les fées (poilues) protectrices du verger : Awd Goggie & Gosseberry Wife

Quoi de plus amusant que de découvrir de nouvelles créatures féeriques, surtout quand elles sont assez différentes des fées victoriennes anthropomorphes, mignonnes et un peu mièvres ? Je crois en avoir croisé une dans mon jardin récemment, comme vous pouvez le voir sur la photo 😉 Je vous présente donc ces deux fées poilues… auxquelles il vaut mieux éviter de se frotter !

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Les gardiennes invisibles du verger : Awd Goggie et Gooseberry Wife

Dans la campagne anglaise, à l’abri des regards indiscrets et des récoltes précoces, deux figures folkloriques veillaient silencieusement sur les vergers et les haies fruitières : Awd Goggie et la Femme-Groseille (Gooseberry Wife). Utilisées depuis longtemps pour effrayer les enfants et protéger les fruits non mûrs, ces créatures appartiennent à une catégorie fantastique appelée nursery bogies — des êtres dont le rôle est à la fois éducatif et protecteur.

Awd Goggie, originaire du Yorkshire de l’Est, prenait la forme d’une énorme chenille velue (assez grande pour dévorer les enfants désobéissants). Tapie dans les bois ou cachée derrière les pommiers, elle surveillait ceux qui tentaient de cueillir les fruits avant leur maturité. Dotée du pouvoir de devenir invisible, elle incarnait une menace à la fois tangible et mystérieuse — souvent évoquée par les adultes sur un ton grave :

« Ne touche pas à ces pommes, ou Awd Goggie te dévorera. »

À l’autre bout de l’Angleterre, sur l’île de Wight, la Femme-Groseille remplissait un rôle similaire. Elle apparaissait aussi sous la forme d’une chenille géante, rôdant près des buissons de groseilles, toujours attentive aux petites mains curieuses. Là encore, la peur servait de barrière protectrice entre les enfants et les cultures.

Malgré leurs différences géographiques, ces deux créatures partagent des caractéristiques communes :

  • Une apparence volontairement inquiétante, destinée à marquer les esprits
  • Un rôle de gardiennes du cycle naturel de maturation
  • Une fonction de régulation sociale, mêlant dissuasion et imagination

À travers elles, émerge une forme de pédagogie fondée sur le respect de la nature et de ses rythmes. Plutôt que d’imposer des règles sèches, les communautés rurales transmettaient des valeurs et des avertissements par le biais de récits et d’enchantements. Ces bogies inspiraient la peur, certes — mais elles enseignaient aussi que chaque être vivant doit suivre son propre rythme, et que récolter trop tôt peut avoir des conséquences.

Bibliographie/Sources :

  • Bane, T. (2013). Encyclopedia of Fairies in World Folklore and Mythology. McFarland & Company.
  • Briggs, K. M. (1971). Abbey Lubbers, Banshees, and Boggarts: An Irregular Compendium of Fairy Lore. Pantheon Books.
  • Simpson, J., & Roud, S. (2000). Dictionary of English Folklore. Oxford University Press.
  • Nursery Bogie- The Awd Goggie : https://www.geocities.ws/myste_realm/awd.html/

Méditation Faery pour l’Hiver, par Mut Danu [Tree Mothers]

Cette méditation est extraite du chapitre 27 : Idho, l’if,  de The Tree Mothers par Mut Danu, notre ainée. Ce texte a été traduit par Memnoch pour le magazine Lune Bleue, il apparaît sous le titre : Méditation Faery pour l’Hiver, Visualisation guidée pour le Solstice d’Hiver. 

Méditation : descendre dans le monde-d’en-bas : le passage de l’If

Pour mieux comprendre l’énergie de l’Esprit de l’If, cette méditation ou voyage devra être effectuée à l’aube, juste avant le lever du soleil.

Prévoyez :

  • une bougie allumée
  • et des allumettes.

Éteignez toutes les lumières autour de vous et asseyez-vous confortablement.

Centrez-vous en vous concentrant sur la flamme de la bougie.

Lorsque vous serez prêt, soufflez la chandelle.

Pour entrer dans le monde de la Faery, l’accès se fait par le Nord. De votre espace de méditation, tournez-vous dans cette direction.

Levez votre main et faites le geste d’ouvrir une porte.

Dans votre esprit, visualisez et ressentez vos représentations du Nord : regardez par la porte ouverte le ciel clair d’hiver, sentez le vent froid qui vous enveloppe, voyez le paysage noir, obscur se détacher dans la nuit.

Observez-le, couvert de fourrés d’herbes mortes et distinguez un sentier qui s’en détache.

Restez derrière la porte pendant que votre vision se forme et, lorsque vous serez prêt, passez simplement la porte.

Vous êtes à l’extérieur à l’heure où la nuit et le jour se rencontrent.

Vous sentez la bise froide sur votre visage.

La lune est noire mais le ciel est recouvert d’étoiles qui scintillent.

De votre place, vous pouvez distinguer le paysage qui se détache de la nuit.

Le chemin à vos pieds semble émettre son propre rayonnement devenant de plus en plus faible au fur et à mesure qu’il s’enfonce dans l’obscurité.

Suivez ce chemin.

Ouvrez vos sens à votre environnement.

Sentez les picotements du vent contre votre corps et le sentier irrégulier sous vos pieds. Le vent se renforce au fur et à mesure de votre progression, et vous tenez votre manteau serré autour de vous.

Sentez le vent qui vous pousse.

Au détour du sentier, soudain, un arbre s’élance vers le ciel.

Une haie persistante pousse le long du sentier, les feuilles des plantes se rejoignent pour former un tunnel obscur.

Levez la main pour toucher la branche la plus proche et sentez ses aiguilles fines.

C’est un if centenaire, l’Arbre de la Mort. Faites une pause et réfléchissez à ce que la mort signifie pour vous : la peur, la perte, la douleur, la tristesse.

Vous n’êtes peut-être pas prêt à entrer dans ce tunnel.

Mais le vent change soudain de direction et vous pousse par-derrière. En trébuchant, vous faites un pas à l’intérieur du tunnel.

Une fois à l’intérieur de cet abri naturel, le vent froid n’a plus d’emprise sur vous. Sous la protection de l’if, vous êtes calme, à l’abri des menaces et de la peur. Vous pouvez alors vous avancer dans le tunnel.

Plus loin, le sentier lumineux plonge dans le paysage, ou peut-être en dessous.

Les branches de l’if forment toujours un tunnel solide au-dessus de votre tête.

Les racines s’échappent de la terre et frôlent votre manteau.

Le sentier tourne lentement, comme une large spirale. Devant vous, une vieille femme est assise sur un gros rocher.

Elle porte une grande robe sombre à capuche recouverte de symboles lumineux. Vous en reconnaissez certains, mais pas tous.

Sur ses genoux, un bol noir en terre, rempli de volutes de brouillard.

Au fond de vous, vous avez reconnu l’Esprit de l’If.

Elle est en train de fixer le bol, et ne donne pas d’indice  quant à votre présence. Vous vous asseyez à côté d’elle sur la pierre.

Concentrez-vous, afin de bien ressentir où vous êtes.

Sentez le froid glacial qui s’échappe de la pierre où vous êtes assis et qui émane de son corps à elle.

La femme à la capuche commence alors à remuer le contenu du bol et vous plongez votre regard dans les volutes en oubliant tout le reste.

Au fond du bol, vous revoyez des souvenirs, des scènes de votre vie, des gens, des endroits, des choses qui ont ou ont eu de l’importance pour vous.

Laissez ces images grandir et plongez dans vos souvenirs jusqu’à en faire partie, à les revivre. Vous êtes en train de devenir le contenu du bol.

À présent, lentement, un par un, vous commencez à dissoudre ces événements et images.

Vous ne les rejetez pas nécessairement, bien qu’il y en ait certains que vous désirez oublier.

Allez au-delà de votre ressenti, au-delà de la joie et la tristesse. Regardez ces événements objectivement, comme s’ils étaient ceux d’une autre personne.

Continuez à mélanger ces images de votre passé dans le bol lumineux, jusqu’à ce qu’elles se dissolvent.

Regardez de nouveau dans le bol et vous y voyez, non plus votre passé, mais un liquide luisant de possibilités, une spirale d’étoiles qui se détache du ciel obscur.

Levez les yeux vers la Dame de l’If. Elle tient toujours son bol sur ses genoux, mais maintenant sa capuche est baissée et vous pouvez voir un visage sans âge qui rayonne de l’intérieur.

Assis à côté d’elle, vous ressentez maintenant de la chaleur s’échapper d’elle, et de l’espace autour de vous.

Votre corps baigne dans cette chaleur. Sentez cette chaleur. Sentez le sang qui circule dans vos veines, sentez la terre à vos pieds qui pulse comme un cœur qui bat.

La Dame de l’If se lève alors et écarte les bras.

Elle rejette sa cape en arrière et une lumière dorée s’échappe de ses doigts et de sa chevelure.

Elle rayonne, en connexion avec toute chose, en connexion avec la vie. Puis elle disparaît, laissant l’air ambiant scintiller de lumière.

Au-dessus de votre tête, de la lumière pénètre au travers des branches de l’if comme un millier de minuscules étoiles.

Vous soulevez alors une branche qui vous bloquait le passage et seul, vous vous dirigez vers la sortie du tunnel, vers la lumière du soleil levant.

Prenez un instant pour sentir le soleil. Écartez les bras et respirez profondément. Revenez doucement dans le présent et dans votre espace de méditation.

Ouvrez les yeux, et s’il fait toujours sombre, rallumez la bougie.

Prenez votre journal et écrivez-y ce qui vous passe par la tête : vos sentiments, vos émotions, vos observations. Concentrez-vous sur ce dont vous vous souvenez de votre rencontre avec la Dame de l’If, les sons ou les mots que vous avez entendus, les images que vous avez vues, les idées, la connaissance et les messages que vous avez reçus. Vous pouvez inventer une multitude de questions directement liées à votre situation personnelle.

***

Voici un exemple de questions que vous pouvez utiliser comme point de départ dans vos réflexions de votre journal :

  • Lorsque (être aimé) est décédé, j’ai…
  • Lorsque j’ai perdu (mon emploi, ma relation amoureuse…), la première chose que j’ai faite est…
  • Lorsque j’aurai terminé (l’école, mon projet …), je
    pourrai ensuite…
  • Lorsque je pense à ma propre mort, je ressens….
  • Mes sentiments sur l’après-mort sont…