[Tinne] Le houx, guérisseur du coeur

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Traduction et adaptation : Siduri

Le docteur Bach considérait le houx comme une de ses deux essences primordiales de son répertoire. Tandis que l’avoine sauvage donne à l’âme son orientation dans le monde extérieur, le houx est vu comme une des essences pouvant être utilisées universellement pour guérir l’être intérieur, et pour stimuler la nature aimante de l’âme humaine. Le houx ne doit pas seulement être considéré comme un remède à administrer dans certaines situations thérapeutiques, mais aussi comme une essence-clé, un seuil pour quiconque souhaite progresser dans la thérapie par les essences de fleurs.

Cette reconnaissance du houx par Bach s’inscrit dans une forte lignée de sagesse celtique. Les initiés druidiques développèrent un alphabet sacré, appelé l’Ogham, basé sur les qualités archétypales des arbres. Le houx, connu en gaélique sous le nom de Tinne, gouvernait la huitième lune de l’année, ou le mois de juin. Le symbole pour le houx est celui d’une lance, signifiant littéralement : « je suis une lance rugissant dans la bataille ».

C’est pendant le mois de juin que la lumière du soleil atteint son apogée, puis commence ensuite sa descente vers la terre. Le houx parle de la capacité féroce de l’âme humaine à entamer sa descente vers le monde souterrain, emmenant avec lui la lumière jusque dans l’obscurité. De ce fait, nous pouvons comprendre la signature de l’arbre, sa capacité à germer sans lumière du soleil, préférant les conditions sombres et humides pour voir le jour, ce qui en fait un arbre profondément enraciné dans la terre. Ses feuilles raides et pointues ne sont pas si différentes d’épines ou de « lances ». Le houx produit un bois dur, blanc, au grain serré, au caractère solide et imperméable, qui, revêtu du sombre et inaltérable vert de ses feuilles, se maintient aux jours les plus froids de l’hiver, insensible au froid et à l’obscurité.

Parmi tous les arbres de l’Ogham, le houx et le chêne sont les plus centraux – ils sont vus comme les deux « rois » qui se transmettent chaque année le pouvoir au cours d’une bataille symbolique. Le nom gaélique du houx – Tinne – renvoie au mot « tanist » qui signifie « jumeau sombre ». Le Roi Chêne gouverne pendant le temps où les jours rallongent, de décembre jusqu’au solstice d’été en juin. Le houx est son « jumeau sombre » qui règne ensuite jusqu’au solstice d’hiver, alors que la lumière décroît.

Noël, un éveil du cœur

[ndt : bien entendu, toute référence à Noël me semble ici valable aux célébrations non chrétiennes du Solstice d’Hiver !]

Dans la culture populaire, nous relions le houx à la saison de Noël. Ses baies rouges et son feuillage toujours vert couvrent les façades et les intérieurs. Malheureusement, notre relation à cette plante est essentiellement inconsciente et largement sentimentale.

En réalité, la proéminence du houx pendant la période de Noël révèle une expérience importante de la vie de l’âme. C’est un éveil des forces de l’amour dans le cœur, réalisé à travers la descente à l’intérieur du soi et de la terre, et qui porte ses fruits pendant cette période. Cette compréhension est dépeinte dans le Calendrier de l’Âme de Rudolf Steiner. Steiner fut un initié moderne qui incorpora dans ses travaux des éléments de courants à mystères anciens, entre autres issus de la sagesse druidique. Son calendrier est constitué d’une série de 52 poèmes « runiques », pour chaque semaine de l’année. Débutant son cheminement au solstice d’été, l’âme émanant de hauteurs cosmiques trouve peu à peu son chemin dans une réalité intérieure. Le soi se révèle comme une graine, avec la lumière œuvrant au plus profond de l’être à la manière d’une force purifiante et vivifiante. Puis, au moment du solstice d’hiver, cette lumière s’épanouit et émane du chakra du cœur. […]

C’est la lumière intérieure de l’être, qu’il a gagné en vivant dans les « profondeurs de l’esprit » – en ne faisant plus qu’un avec « la terre du monde ». L’âme est si solidement en sécurité et ancrée en elle-même que rien ne peut atteindre son sentiment de paix profonde. Quand cette conscience est maîtrisée, le cheminement intérieur est complété. Le cœur s’éveille chargé d’un flux d’amour, qui cherche progressivement son chemin dans le monde des sens, afin de rencontrer à nouveau les forces en expansion de la lumière printanière et estivale. Nous pouvons dire que la fleur du houx, qui fleurit dans la nature à la fin du printemps, fleurit à nouveau dans le cœur de l’homme pendant l’hiver, comme une force d’amour. Sa nature est une force solaire qui vit non pas dans les cieux, mais dans les profondeurs de la terre.

Cette capacité de faire fleurir le cœur est l’intention même de l’essence de houx développée par le docteur Bach. En décrivant cette essence, Bach a écrit : « l’ultime conquête aura lieu à travers l’amour et la douceur, et lorsque nous aurons suffisamment développé ces deux qualités, rien ne sera plus capable de nous assaillir, puisque nous ferons toujours preuve de compassion et n’offrirons pas de résistance. » Mechtild Scheffer, dans son Encyclopédie de la thérapie par les fleurs de Bach, décrit le houx comme « la fleur ouvrant le cœur », celle qui aide l’individu à « vivre dans un flux d’amour ».

Comme toutes les essences de fleur, le houx révèle une tension, un apparent paradoxe à l’âme. Avec ses feuilles piquantes et sa rude capacité à survivre dans le monde, le glyphe druidique du houx proclame : « je suis une lance rugissant dans la bataille ». Mais cette hostilité est tournée vers le monde lorsque l’âme n’est pas en sécurité en elle-même, et qu’elle n’a pas encore maîtrisé cette rudesse comme un feu intérieur nourricier. A moins que le soi ne se renforce de l’intérieur, nous ne pouvons aller à la rencontre du monde extérieur de la bonne façon. Nous répondons avec hostilité, envie ou jalousie. C’est pourquoi Bach a mis le houx dans le groupe des remèdes contre « l’hypersensibilité aux idées et influences ». Le houx donne une force au soi qui devient la base première de la compassion.

Le Chevalier Vert – une branche de houx solitaire


Cet apprentissage paradoxal de dureté et de sainteté peut aussi être trouvé dans la légende arthurienne de Gauvain et du Chevalier Vert. Le Chevalier Vert apparaît à la cour d’Arthur pendant les fêtes du solstice d’hiver :

Mais le moindre de ses traits
Les stupéfia ; de ce qu’on pouvait en voir,
Non seulement cette créature était colossale,
Mais elle était aussi d’un vert lumineux,
Nulle lance pour porter des coup,
Nul bouclier contre le choc de la bataille,
Mais dans une main, une branche solitaire de houx
Qui se montre le plus vert lorsque les bosquets n’ont plus de feuilles

Le Chevalier Vert est une manifestation du Green Man – les vastes forces cosmiques de la Nature qui doivent être rencontrées par l’âme humaine et ancrée dans le cœur de l’homme. Porteur d’une branche dans une main et d’une hache dans l’autre, il propose un défi aux chevaliers d’Arthur : celui de lui porter un coup avec cette hache, à la condition que dans un an et un jour, il puisse à son tour rendre le même coup.

Gauvain est un chevalier de grande valeur, bien qu’il soit aussi guidé par des intrigues de cour, des ambitions et des désirs. Il accepte le challenge et coupe la tête du Chevalier Vert d’un seul coup. Mais celui-ci se relève, remet sa tête et rappelle à Gauvain sa promesse.

Pendant toute une année, Gauvain erre à travers le pays à la recherche de la Chapelle Verte où il doit retrouver le Chevalier. Au cours de son périple, il se retrouve tenté par une femme, qui s’avère être l’épouse du Chevalier Vert. Gauvain émerge de cette rencontre avec le cœur pur et finit par trouver l’endroit où vit le Chevalier : « une fissure entre deux parois escarpées où pousse des arbres verts même en hiver ». C’est ici, sur la terre des houx, que Gauvain rencontre le Chevalier Vert, et, intact, survit à son coup. […]

Le houx porte la couronne

Le houx stimule les capacités d’amour du cœur en développant ce que le docteur Bach appelle « le grand Moi intérieur ». Peut-être que la plus significative des images archétypales du houx est évoqué dans le symbole de la couronne d’épines. Comme le proclame un chant traditionnel de Noël : de tous les arbres des bois, c’est le houx qui porte la couronne.

Les druides portaient du houx dans leurs chevelures pendant la récolte du gui en hiver. Le houx est également porté pour représenter le Roi Houx pendant les festivals saisonniers. La couronne de houx était un signe de respect profond et de reconnaissance, indiquant qu’un initié avait maîtrisé les forces de la nature en harmonie avec celles de l’âme humaine.

Dans la culture romaine, il restait des traces de cette compréhension dans certaines fêtes hivernales comme les saturnales.

Les Romains craignaient la nature spirituelle de Jésus Christ, tout en s’en moquant […] Cette image archétypale du Christ couronné d’épines résonne avec les profondeurs de notre être. Puisque c’est le Christ qui porte dans son cœur les forces les plus parfaites de l’amour divin, qui est en même temps l’amour humain. La force christique, née des profondeurs de la terre à minuit le jour de Noël, brille comme l’essence de l’amour dans le cœur humain. […]

Le houx a été connu sous le nom d’ « épine du Christ » en Europe Centrale, ce nom manifestant sa résonnance avec la réalité archétypale de la couronne d’épines comme initiatrice de l’âme. Le docteur Bach caractérisa ceux ayant besoin du houx ainsi : « en eux, ils souffrent beaucoup, souvent sans qu’il y ait de réel cause de leur absence de joie ». Cette douleur existentielle liée au sentiment de ne pas être aimé conduit vers des sentiments de jalousie, d’envie, d’hostilité et de colère. Comme le Chevalier Vert et Gauvain, qui échangent des coups portés à la tête, afin de transformer la conscience, la couronne d’épines symbolise aussi une forme de « décapitation ». Le « faux moi » doit être pressé avec une couronne d’épines jusqu’à ce qu’il trouve une vérité plus profonde dans le cœur. La « lance rugissant dans la bataille » ne doit pas porter son coup vers l’extérieur, mais vers l’intérieur. Le houx nous enseigne que nous ne pouvons trouver l’amour à l’extérieur s’il n’est pas ancré à l’intérieur même de notre cœur. Il transforme l’humain en divin, de l’intérieur. Le houx aide le cœur à se connaître dans son entièreté ; dans sa sainteté.

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