Tradition Faerie Faith : Comprendre les « Arbres », la Vigne

La vigne

Extrait de la thèse : The Faerie Faith and the Beth-Luis-Nion Celtic Lunar Tree Calendar par James Clifford Landis. Traduction : Fleur de Sureau. Pour revenir au menu, c’est ici.

La vigne est la dixième lune. Son nom gaélique est Muin (prononcé « Muhn »).

Le glyphe pour la vigne est : « Je suis une colline de poésie. »

  • Utilisations de la plante et folklore

Généralement, qui dit vigne dit raisin, mais nous pouvons lui substituer le roncier (mûres). Notre système peut absorber le sucre du raisin sans que la salive le décompose. Cela peut être utilisé pour reprendre des forces et enrailler la consomption. Les feuilles et les pépins de raisin peuvent être employés pour arrêter saignements et hémorragies. La sève peut être utilisée comme une lotion pour les yeux fatigués et pour les tâches sur la cornée (Grieve 832). Et, bien sûr, le raisin est comestible.

Selon une superstition intéressante, si vous trouvez un chat mort, en particulier noir un tomcat noir, et que vous l’enterrez sous votre vigne, cela aidera celle-ci à se développer (Vickery 158).

L’écorce, les racines et les feuilles du roncier sont très astringentes, et étaient employées pour soigner la dysenterie et la diarrhée (Grieve 109). Les baies sont comestibles et peuvent être entrées dans la composition dans un grand nombre de mets.

Dans le folklore, la consommation des mûres était interdite après une certaine date (qui variait selon le récit, mais qui concernait généralement le mois de Muin). La raison de cette interdiction tient au fait que l’on disait qu’après cette date des influences mauvaises imprégnées les mûres : n’importe quoi, du boogey Pooka au Diable, en passant par les sorcières, était à blâmer. Le lien entre les mûres, la mort et la période déclinante de l’année existe dans de nombreux contes populaires (Vickery 45-7).

Et pourtant, dans le même temps, on disait que les mûres sauvages offraient un remède contre tout : de la coqueluche aux points noirs. Rampez autour ou sous un roncier et vous y laisserez vos maux. La comptine : « Here we go round the mulberry bush (ndlt : nous dansons autour du mûrier) » pourrait dériver de cette pratique, car le mûrier commun est un proche parent de la ronce (Vickery 48-9).

  • Mythologie et symboles

Le glyphe de la vigne la relie aux Muses et à Mnémosyne, leur mère. Elle est aussi reliée à Minerve, la déesse romaine de la sagesse. Le vin est la boisson classique du poète, comme le montre le dieu extatique Dionysos (Graves 210). Le pouvoir de la poésie était révéré par les anciens Celtes. Si quelqu’un osait insulter un poète, ce dernier avait le pouvoir de composer sur son adversaire une satire propre à lui faire éclore des pustules noirâtres sur la face et à lui faire tourner ses entrailles en eau, ou le pouvoir de lui lancer un tel sort qu’il lui fasse perdre la raison (Graves, 22).

  • Énergies

Linda Kerr explique le rôle de la vigne au sein du cycle des Arbres :

« L’inspiration poétique commence durant le Noisetier, mais la Vigne est réellement la lune du poète. La Vigne est une colline de poésie, de talent artistique, d’inspiration et d’imagination débordant du tissu même de notre être. La Vigne est une lune guérisseuse et tonifiante, une période pour nous guérir des coups que nous prenons durant le Houx, ainsi que de l’épuisement ressenti durant le Noisetier. Nous ressentons en même temps joie et tristesse, euphorie et colère. C’est une période de guérison par la créativité. Nous pouvons commencer à exprimer cette période d’inspiration et d’imagination sans même nous en rendre compte. Nous pouvons refaire une pièce de la maison, changer les meubles de place, commencer à écrire ou à travailler sur les cadeaux de Noël. Nous ressentons beaucoup d’énergie intérieure et pouvons avoir une centaine d’idées différentes que nous désirons accomplir. Nous sommes maintenant comme la Vigne : enthousiastes, légers, flexibles, nous croissons à un rythme étonnant et pourtant, nous sommes solides et productifs. » (Kerr, “Lunar”).

Pendant cette période, l’étudiante ressent l’inspiration à son apogée qui accompagne les trois arbres de l’inspiration. Comme l’a dit une étudiante : « j’ai l’impression que les Muses sont en train de dégobiller dans ma tête ! » De nombreuses pensées nous viennent à l’esprit et nous sommes facilement distraits. Là encore, nous pourrions avoir envie de nous distraire de notre travail ou, au contraire, fuir dans le travail. C’est le moment de faire usage de la créativité à notre disposition pour améliorer notre vie, non pas pour la fuir.

Muin, le roncier

Extrait du site encoenchantements (très joliment illustré)

MUIN – Le roncier. (La vigne dans une bonne partie de l’Europe)

Lettre M. 10ème mois lunaire : 2 septembre – 29 septembre.

Guérison, Protection, Abondance, Richesse.

Le fruit du roncier est la mûre, le « meuron » dans le Nord et en Haute-Savoie, « amora » en occitan, « Mouar » et « mouar-penn » en breton…*

En gaélique, elle se nomme « dris-muine ».

 

Les ronciers à mûres, avec leurs longues tiges épaisses et épineuses , font communément des voûtes par les sentiers et les haies d’Angleterre, grimpant les barrières se transformant en grands murs impénétrables si on ne la surveille pas.

Ils poussent aisément dans toutes sortes de sols, avec une préférence pour les sablonneux, à l’ombre comme au soleil, bien que, comme la plupart des plantes, elles fleuriront et bourgeonneront mieux si elles ont de la lumière en suffisance pour elles.

Aller aux mûres reste un passe-temps familial depuis des siècles : les doigts et bouches tachés de pourpre sombre par un « picorage en passant », les égratignures le long des bras à cause des épines crochues et sans merci, mais la gloire d’une récolte  à manger fraîche ou à cuisiner en délicieuses gelées et crumbles.

Dans l’histoire des oghams celtiques, des traditions de pays les plus au nord en Europe tenaient pour sacré le bois de roncier pour le dixième mois lunaire.

Dans les pays plus chauds et plus au sud, le bois sacré est la vigne.

Ces deux plantes ont une façon de pousser, une période de récolte et une couleur de fruits similaires. Toutes deux ont de bonnes propriétés curatives et leurs fruits peuvent être utilisés pour faire des boissons.

La médecine du roncier

Les mûres sont aujord’hui parmi les « super anti-oxydants » Elles sont très riches en Vitamine C, A, Omega 3, Potassium et Calcium.

Toutes les parties de la plante sont utilisées depuis des siècles en remèdes : Les natifs américains faisaient une décoction de racines et feuilles pour aider aux problèmes de digestion et aux douleurs d’estomac.

Nous savons aujourd’hui que le caractère astringent de la plante est dû à une forte teneur en tanins. Elle est une source de salycilates, proche de l’aspirine, qui aide à soulager les inflammations.

Mâcher des feuilles pour guérir les saignements de gencives et la perte des dents qui s’ensuit est un remède séculaire.

John Gerard, herboriste du XVIe siècle, indique dans son « Grand Herbier » (Great Herbal) une recette de feuilles de roncier bouillies dans de l’eau avec du miel, de l’alun et un peu de vin blanc à prendre en bains de bouche pour « fixer les dents ».*

Culpeper conseille une décoction de bourgeons, feuilles, copeaux de bois pour traiter « les plaies fétides de la bouche et de la gorge ».

Recette de tisane de feuilles fraîches (1 mug) :

Une pleine poignée de feuilles de roncier fraîches, 1/2 mug d’eau, du miel.

Optionnel : un petit morceau de tige, d’écorce ou de racine propre et quelques mûres pour la couleur.

Faites frémir les feuilles (et l’éventuel autre morceau) dans l’eau pendant à peu près 10 minutes, sans faire bouillir pour garder le plus de vitamines. Versez dans une tasse et ajouter du miel. Cette tisane vitaminée, rafraîchissante et anti-oxydante quand elle est chaude peut être utilisée froide en gargarismes pour les maux de gorge

Religions, spiritualités, folklores

Elément : Eau

Planète : Vénus

Genre : féminin

Déités : Brigit

Il était coutume, dans de nombreuses îles britanniques, de ne pas manger les mûres. Il fallait les « laisser pour les fées ». Il me semble, pour ma part, qu’il devrait y en avoir beaucoup, pour tout le monde et que les êtres magiques que je connais seraient ravi de partager, à moins que vous ne soyez tombés dans les pattes des plus méchants !

Dans le « langage des fleurs » victorien, une brindille de roncier en fruits ou en fleurs dans un bouquet de fleurs offert pouvait signifier envie, remords ou humilité.

Richard Folkard, dans « Les plantes, folkore, légendes et paroles. » (Plant lore, Legends and Lyrics), 1884, nous dit :

« Rêver que l’on franchit des lieux couverts de ronces laisse présager des ennuis; si elles vous piquent, des ennemis secrets vous porteront préjudice par vos amis; si elles font couler le sang attendez-vous à une perte importante en affaires. Rêver de franchir les ronces et rester indemme indique le triomphe sur vos ennemis.« 

La légende la plus centrée sur la mûre nous indique de ne pas en manger après le jour de Michaelmass, jour de la fête des archanges, le 29 septembre. Ce jour de fête était auparavant célébré le 10 octobre. L’histoire est une concoction ancienne de christianisme, paganisme et contes de grand-mère :

Dieu sourit à ses deux plus grands archanges, Michel et Lucifer. Ils sont les plus sagaces des anges du ciel, pourtant Lucifer était sans doute, plus que nul autre, le plus beau. Son nom signifiait « le Lumineux ».

Dieu lui avait donné beauté et intelligence  au-delà de toue mesure et Lucifer aurait dû l’aimer et lui obéir pour toujours. Mais il était fier aussi. Devenu arrogant, il en vint à penser : « Je vais monter aux cieux et établir mon trône parmi les étoiles » . Il trouva d’autres anges pour le suivre dans sa rébellion.

Dieu ne pouvait permettre une rébellion ni laisser ces pécheurs prétendre prendre sa place. Il jugea donc que Lucifer et ses suivants seraient punis et exclus des cieux.

Lucifer tomba comme tomba sûrement Icare, à travers le cosmos, jusqu’à tomber sur terre dans un énorme buisson de baies noires et d’épines qui déchirèrent ses ailes et ses voiles. Il fut retenu prisonnier un moment.

Lucifer se débattit pour échapper à la ronce et, une fois dégagé, il se trouva si en colère qu’il cracha dessus et certains disent même qu’il la conpissa afin de montrer son mépris. Lucifer avait changé de nom, du Lumineux, il était devenu Satan, l’adversaire. Depuis, les mûres ne sont plus bonnes à manger passé le jour où Michel devint chef des Archanges au ciel, au jour de la fête de Michaelmass.

Les légendes populaires se basent généralement sur des faits de sens commun : les mûres sont effectivement moins agréables à manger après fin septembre, elles deviennent pleines de moucherons et le goût de leur tanin est beaucoup plus fort.

Magies, charmes et croyances du roncier

*Brûlez une petite poignée de feuilles sèches comme encens ou au-dessus d’une flamme. Décuplez son pouvoir en utilisant une bougie jaune, or ou verte pour la richesse.

*Les tiges de ronces ayant naturellement poussé en forme d’arc sont utilisées pour la guérison des rhumatismes et de la coqueluche. Les bébés étaient passés,  de préférence d’est en ouest, à rebours sous l’arche une fois et dans l’autre sens trois fois; un enfant plus grand ou un adulte devait la franchir, tandis que les assistants demandaient l’assistance des déités.

*Météo : Lorsque les mûriers sont en fleurs (Juin-Juillet), un coup de froid appelé L’hiver des mûres, présage d’un hiver glacial.

* Pour apaiser les brulures de peau, trempez neuf petites feuilles de ronce dans l’eau de source et pose les sur le feu en chantant trois fois cette invocation à Brigit, déesse celtique de la guérison et la poésie (Voir l’original sur le site) :

Trois dames venues de l’est,

une avec le feu et deux avec le givre.

Avec le feu et le givre.

* Cueillez un petit morceau de tige de ronces à Mabon (22 ou 23 septembre) ou lors de la lune des moissons. Ôtez précautionneusement ses épines et son écorce, chargez-la de votre intention, puis gardez-la sur vous comme charme pour prévenir la pauvreté.

Traduction par Beth Svitma

Notes :

* Si vous connaissez d’autres noms ou voyez une erreur ici, merci pour votre coup de pouce ! ;)

*John Gerrard Great Herbal

Muin : correspondances Faerie Faith

Vigne/Muin

Extrait de The Faerie Faith and the Beth-Luis-Nion Celtic Lunar Tree Calendar par James Clifford Landis. Traduction : Fleur de Sureau.

Correspondances pour le système BLN du Calendrier des Arbres Lunaires celtiques. Extrait de “Lunar Tree Energies” par Linda Kerr, et la Déesse Blanche par Robert Graves.

 

Glyphes

Je suis une colline de poésie

Couleur

bigarrée

Lettre

MuinM

Animaux

serpent, mésange

Symboles

Baguette de vigne ou ronce, rouleau de parchemin ou papier, triple spirale

Archétypes féminins

Dana, Bridget, Minerve, Les Muses, Artémis, Mnémosyne

Archétypes masculins

Dionysos

Guérisons

saignement, blessures, besoin d’un tonique

Mystères

joie, euphorie, croissance/éternité, souvenir, inspiration, retour de réincarnation

Energies des Arbres Lunaires : la Vigne

Par Linda Kerr, extrait du site faeriefaith.net
Traduction : Fleur de Sureau pour le coven d’Ignis Daemonis.

Vigne

Dixième Lune

Les mûres, la vigne

  • Glyphe – Je suis une colline de poésie
  • Animaux – serpent, mésange
  • Couleur – bigarrée
  • Guérison – saignement, blessures, besoin d’un tonique
  • Mystères – joie, euphorie, croissance/éternité, souvenir, inspiration, réincarnation
  • Substitut : chèvrefeuille, vigne des bois
Muin. Vigne. Septembre 2014.

L’inspiration poétique commence durant le Noisetier, mais la Vigne est réellement la lune du poète. La Vigne est une colline de poésie, de talent artistique, d’inspiration et d’imagination débordant du tissu même de notre être. La Vigne est une lune  guérisseuse et tonifiante, une période pour nous guérir des coups que nous prenons durant le Houx, ainsi que de l’épuisement ressenti durant le Noisetier. Nous ressentons en même temps joie et tristesse, euphorie et colère. C’est un moment de guérison par la créativité. Nous pouvons commencer à exprimer cette période d’inspiration et d’imagination sans même nous en rendre compte. Nous pouvons refaire une pièce de la maison, changer les meubles de place, commencer à écrire ou à travailler sur les cadeaux de noël. Nous ressentons beaucoup d’énergie intérieure et pouvons avoir une centaine d’idées différentes que nous désirons accomplir. Nous sommes maintenant comme la Vigne ; enthousiastes, légers, flexibles, croissants à un rythme étonnant et pourtant solides et très diversifiés.

Comme pour la plupart des lunes, la Vigne a une nature double, à l’image du poète qui a un pied dans la tombe alors même que sa tête effleure la sagesse et l’inspiration prophétique. La Vigne est également la lune de la vraie complétude ; c’est la fin d’un cycle et le moment juste avant le début du suivant.

La Vigne nous donne aussi le vin, la boisson traditionnelle du poète. La Vigne est sacrée pour Dionysus, Osiris et Bacchus. Veillons cependant à ne pas nous enivrer du fruit de la vigne, car alors nous glisserions de la créativité au laisser-aller et à la stupidité.

La spirale est un symbole de cette lune, une forme que l’on voit partout dans la nature et toutes formes de vie. La spirale n’a ni début ni fin. Durant la Vigne, le voile du temps s’affine et vous pouvez quitter ce temps et ce lieu, pour entrer dans le « il-était-une-fois ». La Vigne nous dit de nous rappeler notre passé, de nous rappeler notre futur. C’est un excellent moment pour la divination, pour regarder en nous-mêmes.

Ainsi, le poète en chacun de nous est capable de réfléchir aux expériences passées, à la sagesse à venir et d’atteindre l’inspiration. Néanmoins, l’inspiration n’est pas une chose temporelle, mais hors du temps. Ce qui est intemporel, infini et divin ne peut être atteint par l’esprit conscient. Le mental est uniquement un produit du temps ; il ne peut fonctionner sans le temps, le savoir (l’accumulation de l’expérience) et la pensée. La pensée rationnelle, le mental qui commande et calcule – tout cela correspond à des aspects Yang et empêche l’accès de l’inspiration à nos esprits.

  • Energies négatives de la Vigne : émotions fortes, hauts et bas, joie et colère intenses. Vivre dans le passé, refuser de changer. Opinons bien arrêtées, psychorigidité.
  • Pour surmonter ces énergies négatives : prendre une baguette de ce végétal. Quintessences de Bach possibles pour la Vigne : Honeysuckle et Vine.

La Danse et le Chant de Pouvoir

Extrait du livre « Cœur de Chaman » par Arthur Sörensen.

Deux chamanes. Photo: Musée ethnologique de Vienne.
Deux chamanes. Photo: Musée ethnologique de Vienne.

Michael nous présente une technique utilisée par les Indiens pour trouver un « chant de pouvoir ». « Nous allons accomplir ensemble un rituel. Sept volontaires joueront du tambour avec moi ; nous marcherons en rond au centre du cercle. Vous resterez assis à écouter tout en cherchant un son, un sentiment ou un mouvement en vous-mêmes. Lorsque vous entendrez votre chant, vous le signalerez aux joueurs de tambour. Nous cesserons alors de jouer et vous aiderons à vous mettre debout. Nous écouterons votre chant pour l’apprendre et vous deonnerons des maracas, de façon à ce que vous puissiez en indiquer le rythme. Nous formerons une procession derrière vous, en suivant le tempo que vous nous aurez indiqué et en chantant avec vous. Certains ne trouveront pas leur chant. Ils resteront donc assis, tout en apportant leur soutien à ceux qui chantent. Ceux-ci, animés par leur danse, sentiront que leur pouvoir les emplit, ce que les autres pourront d’ailleurs voir et sentir. Lorsqu’ils auront dansé leur chant, ils donneront un peu de leur pouvoir à ceux qui, dans le cercle, en ont besoin. »

Pressés de commencer, nous mettons tout – coussins, couvertures et tambours – de côté.

« Huxley » est secoué par le rythme des tambours. Sept joueurs de tambour, conduits par Michael, tournent en rond, tandis que les autres restent assis à attendre, les yeux mi-clos. On dirait une procession funèbre du Moyen Age. Soudain, je remarque que quelqu’un se lève et chante tout en conduisant le groupe de joueurs. Au bout d’un moment il se rassied et un autre prend sa place. Ce manège dure un bon moment. Je me sens envahi par le doute : tout cela n’est-il pas absurde ? Rester assis là, à se laisser submerger par le son des tambours, les cris et le bruit… Je me demande dans quelle mesure cette expérience de chants spontanés est authentique.

Tout d’un coup, quasiment en réponse à mes doutes, j’entends une mélodie. Un son bref qui se répète tout au fond de moi. Je ressens une chaleur qui se répand dans ma poitrine, ainsi qu’un profond sentiment de paix et de joie. Je me lève, les jambes engourdies d’être resté assis aussi longtemps. Les joueurs de tambour me voient et viennent vers moi. Ils me mettent des maracas dans la main droite ; je les secoue avec force. Un véritable sentiment de liberté envahit ma poitrine tandis que je chante ma mélodie aux joueurs. Je danse à l’intérieur du cercle et les tambours résonnent. Moitié dansant, moitié courant, je chante. Tout d’un coup la mélodie en moi se tait et je m’arrête, suant et tremblant. Hébété, je regagne ma place dans le cercle.

Michael nous demande, à Judy et à moi, de charger de pouvoir l’un des tambours en le tenant entre nos mains tendues. Judy aussi a dansé son chant. Le tambour est maintenant devenu un puissant outil de guérison. Je le sens se diriger lui-même vers l’endroit où on a besoin de lui, d’abord chez Jim, puis chez Richard et enfin chez Paul.

Lorsque Judy et moi avons fini de faire circuler le tambour, tous trois parlent de ce qu’ils ont ressenti. Le silence envahit la pièce, comme si tous ensemble nous avions créé une cathédrale. Lentement les gens se lèvent, titubant dans la nuit, plongés dans leurs réflexions.

Je m’assieds dans un coin de la salle à manger, loin des conversations et des discussions, pour boire un bol de thé chaud à la menthe. Je cherche à comprendre les expériences de la soirée.

Michael vient vers moi, une tasse de café et un morceau de gâteau à la main. Nous parlons des Samoyèdes. Il est convaincu que ce peuple possède, de tout le continent européen, la plus ancienne connaissance des rituels chamaniques et qu’ils se battent pour conserver leurs traditions vivantes. Il dit que certains Samoyèdes ont encore leurs tambours, les runebommers, comme ils les appellent, et qui sont de deux types : l’un est un tronçon d’arbre évidé, avec une peau de renne tendue par dessus, l’autre, plus courant, comporte un cadre fin et arrondi. Ces tambours sont généralement de forme ovale et leur peau est ornée de thèmes mythologiques.

Michael va se coucher et je sors sur la terrasse. Un couple assis me regarde. Je sais qu’ils brûlent de curiosité et voudraient bien savoir ce que fait le groupe chamanique. Mais je ne me sens pas capable de parler avec eux. Encore agité, je m’assieds près du feu, pour laisser les braises rougeoyantes, qui s’éteignent peu à peu, calmer mon cœur et mon esprit.