Gèadh / L’oie in « l’Oracle des Druides » par Philip & Stephanie Carr-Gomm

Illustration Bill Worthington
Illustration Bill Worthington

La carte représente un couple d’oies cendrées dans un marais . Ancêtre de l’oie domestique , l’oie cendrée conserve toute sa vie le même partenaire.C’était autrefois la seule espèce d’oie vivant en Grande Bretagne et contrairement à d’autres oiseaux, elle ne migrait pas . Des ronces et des groseilles à maquereaux ( que l’on nomme baie à l’oie en anglais) pousse au premier plan . On voit de la patte d’oie sur la droite et des roseaux NGetal ) à l’arrière plan. Un vol d’oie en V se dirige vers la mer.

L’oie signale peut être que vous êtes prêt a assumer la responsabilité d’une famille ou a vous engager dans une relation à long terme. Elle vous donnera la force créatrice et productive , tout en vous assurant que votre famille, votre partenaire ou vos associés  soutiendront votre créativité en en vous procurant un environnement stable  dont vous avez besoin . L’éducation des enfants est véritablement une des activités apportant le plus de joie et de satisfaction. Très attachée à sa famille, mais capable de voler aussi à une altitude extraordinaire d’un continent à l’autre, l’oie montre qu’il est possible d’associer les aspirations matérielles et spirituelles dans no vies quotidiennes.

Renversée: la carte indique que vous êtes peut être trop attaché à vos droits, votre territoire, vos possessions: cessez de vous montrer aussi possessif avec votre partenaire. beaucoup d’oie gardent leur partenaire à vie mais ce n’est pas le cas de tous les humains. Rester avec quelqu’un qui ne vous convient pas n’est peut être pas dans vote intérêt.  Un relation faite pour durer doit être basée  sur le respect mutuel et la liberté de chacun plutôt que sur la jalousie et la possessivité.

Les celtes élevaient les oies  pour leur oeufs  et non pour leur viande. Ils savaient qu’il vaut mieux posséder  une oie vivante que de la manger  et de tuer sa capacité productive. De même ils élevaient principalement  les moutons pour leur lait et leur laine. Nous pouvons en tirer la leçon, qu’il faut prendre soin de nous même si nous voulons optimiser nos force créatives et productrices.. pour être sure que’ l’oie continue a pondre ses oeufs d’or  nous devons la garder bien en vie, nourrie, reposée, entrainée.

 

L’oie dans la tradition

Nuée d’abeilles et de scarabées

douce musique du monde bourdonnement léger ;

Oies sauvages, oies marines,

juste avant le jour des morts, musique du torrent sombre

Poème irlandais du X ème siècle

On disait autrefois que les druides savaient interpréter le vol des oiseaux pour prédire l’avenir. Ils se servaient aussi bien de leurs facultés psychiques  que de leurs dons remarquables d’observation de la nature.  L’arrivée ou le départ des oies migratrices étaient par exemple liés  a l’arrivée de l’hiver ou de l’été. L’oie symbolisait donc le changement saisonnier. Les oies s’éloignant vers la mer étaient le signe de beau temps, alors que se réfugiant vers les collines  elles annonçaient la tempête.  Dans le poème ci dessus les oies marines sont les oies arrivant en  Grande Bretagne en octobre.  Venant de l’arctique juste avant la Toussaint elles annonçaient avec certitude l’arrivée  de l’hiver?  D’origine inconnue ,  on disait  qu’elles éclosaient d’un anatife fixé a un morceau de bois flottant, d ‘un arbre ou même d’un gland . En Ecosse on les appelait parfois  « oies des arbres »   car la légende voulait qu’elles naissent des saules  poussant dans les Oracles. La divination avait lieu traditionnellement a Samhuinn, mais se pratiquait en général pendant tout l’automne, période favorable à l’introspection et à la réflexion.  Lors de la fête de « Michaelmas »  version chrétienne de l’équinoxe d’Automne, on mangeait traditionnellement une oie. On examinait l’os de son gosier appelé l’os de fête dont on arrachait les deux cotés pour prédire l’avenir . il nous reste de cette tradition datant sans doute  de l’époque pré chrétienne de faire un vœu en tirant l’un des cotés de la fourchette (os) du  poulet.

LA FOUGUE DE L’OIE

L’oie est fortement associée à l’agressivité et à  la défensive.  Elle sait défendre vigoureusement  sa couvée et son territoire.  Ses cris aiguës ne manquent pas d’attirer l’attention  sur l’arrivée de visiteurs. Elle est par conséquent devenue le symbole  de la force défensive et de la protection.  On peut voir au sommet de la colline de Roquepertus, en Provence,  une grande oie de pierre perchée sur le portique d’un temple de l’age du fer.

Elle surveille avec attention les alentours  de ce sanctuaire  consacré aux dieux de la guerre. Une figurine en bronze  a été retrouvée a Dinaeault, en Bretagne,  représentant une déesse celtique de la guerre portant un casque surmonté d’un oie. L’animal est représenté dans la position menaçante , le cou projeté en avant. En ex Tchécoslovaquie ce sont les guerriers de l’age du fer enterrés avec des oies que l’on a retrouvés. Cependant les oies sauvages savent fuir aussi bien que se battre. On sait qu’elles sont difficiles à  capturer et à tuer.

POUVOIR EROTIQUE ET FIDELITE

Les oies défendront  avec acharnement leur partenaire et leur couvée. Leurs oisons, bien que sachant voler  deux mois après leur éclosion restent beaucoup plus longtemps avec leurs parents. Les rencontre d’un couple d’oie sont toujours marquées par une parade nuptiale  complexe: l’oie symbolise donc la galanterie, le couple et la fidélité. Son penchant à rechercher un partenaire l’a pourtant faite associer aux mœurs facile. A l’époque élisabéthaine on donnait son nom aux prostituées et  on désignait les maladies vénériennes sous le terme   « d’Oie de Winchester ».Mais l’oie est en réalité extraordinairement fidèle et dévouée. Son lien pré-chrétien  avec la création et toutes les associations érotiques que ça entraine, s’est déformé pendant la période chrétienne.

Bien que la graisse d’oie est une réputation aphrodisiaque chez les romains , les Celtes s’en servaient de remède. On l’appelait Gibanirtick sans l’ile de St Kilda, l’ile la plus reculée de Grande Bretagne, ou les premiers missionnaires chrétiens n’arrivèrent qu’en 1705. Les habitants de cette ile au nord de l’Atlantique  continuèrent donc jusqu’au milieu du XVIIIe siècle a d’adhérer aux croyances et pratiques druidiques rattachées a la graisse d’oie.

Très attachée a sa famille et volant a des altitudes étonnantes, l’oie symbolise a merveilles l’union du ciel et de la terre. elle nous montre comment associer nos aspirations quotidiennes et spirituelles. Un poète américain, Mary Oliver, a exprimé dans un très beau poème cette combinaison entre liberté et attachement. en voici un extrait :

les oies sauvages,

haut dans le ciel pur, retournant au pays a nouveau,

Qui que tu sois, quelle que soit ta solitude,

le monde s’ouvre a ton imagination.

Comme l’oie sauvage il t’apelle

affirmant et réaffirmant ta place au sein des choses

Les « Hex signs »

Mut Danu propose dans le chapitre de « Tree Mothers » consacré au mois de Gort de créer des « Hex spells ». Je m’intéresse au sujet depuis un moment et j’en ai donc profiter pour écrire l’article que voici. Peut-être vous aidera-t-il à voir la rosace – qui apparaît dans l’emblème du coven – d’un autre œil :)

Trouvé sur www.dutchhexsign.com

Un peu d’histoire

Les « Hex Signs » ou « Hex spells » sont des symboles de l’art populaire de Pennsylvanie, apportés par des populations migrantes d’Europe Centrale (Allemagne, Suisse, Alsace) aux XVIIème et XVIIIème siècles. On retrouve ces symboles sur des broderies, de la vaisselle, des meubles peints, mais ils sont surtout connus pour orner les façades des fermes et des maisons. Cette tradition d’ornement de la maison est seulement apparue aux alentours de 1850, mais elle est devenue très rapidement populaire, au point que des « Hex signs » commencent à être commercialisés dès les années 40, à destination des touristes de passage.

D’où vient le mot « Hex » ? On a bien envie de penser en premier lieu à une connexion avec la sorcière, « Hexe » en allemand. Mais en réalité, rien n’est moins sûr. Le terme « Hex » pour désigner ces symboles n’est utilisé que depuis des temps relativement récents : en 1924, Wallace Nutting publie Pennsylvania Beautiful, un ouvrage pour lequel il va enquêter auprès des fermiers d’origine germanique de Pennsylvanie. Ceux-ci n’utilisent alors que des mots très courants comme « Blume » (fleurs) ou « Schtarne » (étoiles) pour désigner leurs peintures murales. Néanmoins, au cours de l’enquête, un fermier utilisa le terme « Hexefuss » (pied de sorcière) dans sa description ; bien que ce terme renvoie à un symbole tout à fait particulier, il fut sans aucun doute mis en avant comme terme générique par l’auteur, et/ou par ses lecteurs, tous certainement séduits par la connotation mystérieuse du terme. Quoiqu’il en soit, le mot « Hex » devint rapidement populaire parmi les Allemands de Pennsylvanie eux-mêmes, grâce à son succès auprès des touristes.

Symboles occultes ou simple art décoratif ?

trouvé sur www.pageneralstore.com

Différentes écoles de pensée se confrontent au sujet des « Hex signs ». Pour certains, l’intention magique derrière ces peintures est indiscutable. Pour d’autres, il ne s’agit que d’éléments décoratifs, éventuellement revendicatifs d’une identité. Il est à noter, pour conforter cette seconde hypothèse, que l’habitude d’orner les maisons de ces symboles n’est apparue qu’au milieu du XIXème siècle, au moment où le gouvernement américain tentait de supprimer le dialecte germanique de la région. Il s’agissait donc peut-être, tout simplement, de réclamer un  héritage pictural issu du folklore germanique.

Néanmoins, plusieurs arguments plaident d’après moi pour tout au moins une origine magique de ces symboles : ainsi, certains groupes religieux germanophones de Pennsylvanie, comme les Amish ou les Mennonites, rejettent les « Hex signs » parce qu’ils les relient à des pratiques de magie ; de plus, la rosace à six branches, élément emblématique de la tradition, se retrouve couramment en Europe Centrale sur les maisons (jusque dans la vallée de Pô en Italie, où on l’appelle Soleil des Alpes), où elle a valeur de symbole de protection ; on peut noter qu’avec ses 6 branches, elle fait penser au Hexefuss cité plus haut – lui-même identique à la rune Hagalaz dans sa version du jeune futhark. Mais elle évoque aussi à l’étoile à six branches ou sceau de Salomon, important signe magique en Europe depuis au moins le début du Moyen-Âge. Le coq, la tulipe, l’arbre de vie sont autant de symboles de protection qu’on retrouve depuis des centaines d’années sur le Vieux Continent, et qui sont réapparus en Amérique dans la pratique artistique du « Hex sign ».

Mais au fond, pour nous autres sorcières et païens actuels, l’origine occulte de ces symboles est-elle réellement si importante que ça ? Comme pour tout autre outil, je crois que ce qui fait l’essentiel de la magie d’un « Hex sign », c’est l’intention que son créateur y insuffle. Et à l’heure actuelle, de nombreuses personnes, en particulier des païens germanisants ou des sorcières, ont choisi d’en faire usage comme des talismans ou des outils de méditation, allant même jusqu’à incorporer des symboles pré-chrétiens ou personnels dans la création de leur « Hex », qu’on ne retrouvait pas jusqu’alors dans la tradition pennsylvanienne. S’il n’est donc pas totalement avéré qu’il s’agissait de symboles magiques au moment de leur (ré)apparition vers 1850, les « Hex signs » le sont devenus pour nombre d’entre nous. Et ça, c’est incontestable.

Motifs et coloris

Sur Les Portes du Sidh, Lune a partagé il y a quelques temps déjà une traduction sur le sujet des « Hex signs » . Je vous invite à la lire et me permets de retranscrire ici les paragraphes traitant des motifs et du choix des couleurs que j’ai trouvés particulièrement synthétiques et intéressants. A noter que pour certains, les « Hex signs » de Pennsylvanie ont aussi bénéficié d’une influence de l’art des tribus natives de Pennsylvanie. Vu l’éclat des couleurs, ça ne m’étonnerait absolument pas.

Voici ci-après, le probable symbolisme ou signification des formes et couleurs employées dans les symboles des sorcières. C’est la forme d’un très vieil art et le sens précis des formes et couleurs n’est pas connu avec certitude.

  • Formes

• Croissants de Lune – Les quatre saisons
• Distelfink – bonne chance et joie… Deux distelfinks – double bonne chance et joie… Deux distelfinks affrontés – amitié vraie
• Pigeons ou Oiseaux de Paradis – amitié, camaraderie, paix, pureté et bonheur
• Aigle – force, courage, vision claire
• Cœur – amour, l’amour durable et l’amour pour les autres
• Feuille de chêne – longue vie, force et endurance
• Ananas – accueil et hospitalité
• Gouttes de pluie – eau, récolte abondante et fertilité
• Rosettes – (on pense que c’est le plus ancien symbole) bonne fortune
• Coquilles Saint-Jacques – vagues de l’océan, naviguer sur une mer calme dans la vie
• Étoiles – protection contre les feux, bonne fortune, espoir, amour, fertilité, énergie et harmonie
• Roue Solaire – chaleur et fertilité
• Tulipes – Foi, espoir, charité et croire en l’humanité
• Blé – Abondance et bonne volonté

  • Couleurs

• Noir – protection, également utilisée pour mélanger ou lier des éléments ensemble
• Bleu – protection, paix, sérénité et spiritualité
• Brun – terre-mère, peut également signifier l’amitié et la force
• Vert – croissance, fertilité, succès dans les choses et idées qui grandissent
• Orange – abondance dans la carrière, les projets et les choses ayant besoin d’un coup de pouce
• Rouge – émotions, passion, charisme, désir et aussi la créativité.
• Violet – les choses sacrées
• Blanc – pureté, le pouvoir de la lune, permet à l’énergie de s’écouler librement
• Jaune – La santé du corps et de l’esprit, l’amour de l’homme et du soleil, connexion à la forme Divine.

Souvenirs de la Vieille Europe

Si je me suis intéressée aux « Hex signs » de Pennsylvanie, c’est parce que j’ai été frappée, lors de leur découverte, par leur ressemblance avec nombre de symboles qu’on retrouve peints ou gravés sur les maisons anciennes de ma région, l’Alsace, et qui m’ont toujours fascinés. J’avais donc envie de conclure cet article en vous présentant quelques « Hex signs » de chez moi ;)

En réalité, en Alsace, on retrouve surtout les symboles de protection traditionnels comme la croix de Saint-André, le « Mann » dans l’assemblage des poutres formant les colombages. Je ne m’étendrai pas là-dessus car la question mériterait un gros article dans lequel je me lancerai sans doute un jour, mais pas tout de suite.

Toujours est-il que sur l’une de ces poutres, généralement visible de la rue et souvent axe principal de l’ensemble de la construction, on retrouve des « cartouches » peints et/ou gravés contenant les informations suivantes : les noms ou initiales du couple fondateur, parfois un fait relatif à leur existence, la date de la construction.

Ce qui est intéressant pour le folkloriste curieux, ce sont les symboles ou autres écrits qui accompagne ces données. Ce que j’ai pu relever au cours de mes balades :

  • Des symboles : rosace à 6 branches, étoile à 4/5/6 branches, cœur, coq, arbre de vie, deux petits oiseaux se faisant face entourés de motifs floraux, svastika, soleil stylisé, croix de différents types, feuilles, tulipe, serpent, lune … Parfois des éléments plus énigmatiques : il m’est arrivé de voir, une fois, un symbole ressemblant fortement à la rune Othila.
  • Des initiales : IHS (Iesus Heiland Seligmacher), CMB (Christus mansionem benedicat ou Caspar, Melchior, Balthazar ou Catharina, Margarete, Barbara), JMJ (Jesus Maria Joseph)
  • Des versets de la Bible (tradition plutôt protestante)

Dans tous les cas, il s’agit clairement d’asseoir l’identité et les limites du foyer et de garantir sa protection (le coq, par exemple, animal qui annonce le lever du soleil et donc la fin de la nuit propice au règne du mal ; la tulipe et ses trois « pointes » stylisées, quant à elle, symbolise la Sainte Trinité, etc), la fertilité et la richesse de ceux qui y habitent. On souhaitait également protéger la maison de la foudre et par extension de l’incendie (le soleil chasse l’orage, etc).

Pour m’arrêter bien souvent devant les maisons arborant ce type de symboles, je suis frappée à chaque fois par leur puissance, encore aujourd’hui ; et par leur beauté, tout simplement ! J’espère que ces quelques lignes vous auront donné envie de vous essayer à l’art du « Hex sign ». Que ce soit en protégeant vos foyers, ou en vous amenant à exprimer vos talents artistiques dans un nouveau domaine, ces symboles peuvent, à la manière des mandalas, être des supports spirituels inspirants :) Lee R. Gandee, peintre de « Hex signs », dit dans son autobiographie qu’il s’agit pour lui de « prière peinte ». J’ai adoré cette expression, et je conclurai donc là-dessus. A vos pinceaux :)

Sources et liens à visiter

http://www.le-sidh.org/wicca/folklore-sorcier/les-symboles-des-sorcieres/
http://unurthed.com/2008/01/07/gandees-hexes/
http://en.wikipedia.org/wiki/Hex_sign
http://www.amishnews.com/featurearticles/Storyofhexsigns.htm
http://www.dutchhexsigns.com/category/dutchhexsignmeanings

Le lierre, folklore

Voici des extraits du livre de Paul Sébillot, « Folklore de France, 3ème tome, La faune & la flore ». 1906.

lierre

« Des fragments d’arbres, ou leurs fruits, constituent des porte-bonheur ou des talismans dont la vertu dépend, soit de l’espèce à laquelle ils ont empruntés, soit de l’époque delà récolte. En Haute-Bretagne, un morceau de gui cueilli sur une épine blanche la nuit qui précède le tirage procure un bon numéro ; dans l’Yonne, un collier de lierre est porté six semaines avant cette opération ; en Wallonie un clou de noix appelé Saint Esprit, mis sous le talon gauche, a la même vertu ; a Liège on l’introduit sous sa bottine pour trouver de l’argent, ou simplement pour avoir de la chance.  » Page 388.

« Les feuilles interviennent aussi en matière de pèlerinage : dans l’Albret, pour savoir de quel mal de saint on est tenu, celui qui consulte place lui-même dehors, après le soleil couché, sur une pierre, une feuille de lierre marquée ; le lendemain la feuille du saint auquel on doit faire la dévotion sera toute marquetée ; en Haute-Normandie, une vieille femme commence une neuvaine, puis elle met trois feuilles de lierre dans un verre plein d’eau bénite ; celle qui jaunit ou se tache la première dénonce le saint auquel est tenu l’enfant malade. » Page 398.

« En Saintonge, le galant évincé par une jeune fille, et vice versa, va, avant le jour, joncher de branches et de feuilles de lierre le chemin par où doit passer la noce. » Page 404.

« Plusieurs essences sont en rapport avec les funérailles : Au Port-Blanc, dans la partie bretonnante des Côtes-du-Nord, on épingle des branchettes de gui et de laurier aux draps de la chapelle mortuaire. Dans le Var, le linceul blanc d’une jeune fille était parsemé de feuilles de lierre. » Page 405.

« Dans presque tous les pays de France on constate l’usage de placer à la porte des cabarets des branches d’arbres au feuillage éternellement vert ; suivant une curieuse notice de Raoul Rosières, c’est une survivance de ceux qui étaient autrefois consacrés à Bacchus. Au XVIe siècle les auberges de Normandie avaient de ces enseignes :

 Pour cornette et guidon, suivre plus tost on doit
Les branches d’hiere ou dif qui montrent où l’on boit .

Actuellement dans ce pays le bouchon ou rameau de verdure est, suivant les localités, de gui, de buis, de lierre, de houx, d’if ou même de laurier. Dans le Cotentin s’il est décoré d’un chapelet de pommes, c’est signe que le débitant a mis en perce un fût de cidre nouveau ; le nombre de pommes dont il se compose indique le nombre de sous que devra payer le consommateur pour boire un pot ou double litre. » Page 406 et 407.

« En Haute-Bretagne, le « coq » est fait avec un petit morceau de bois fendu à Tune de ses extrémités ; on y introduit une feuille de lierre ou de laurier pliée en plusieurs fois ; en soufflant dans cet instrument, on obtient un son
assez doux […] » Page 408.

« On attribue aux fragments de plusieurs arbres des vertus prophylactiques qui tiennent soit à leur espèce, soit à des particularités de diverses natures. En Basse-Normandie les chapelets de gui préservent les enfants des convulsions, et même de l’épilepsie ; dans la Gironde, pour faciliter la dentition, on leur met un collier de racines de lierre, vertes et en nombre impair. » Page 411.

G pour GORT

Extrait de l’Alphabet des Arbres, La Déesse Blanche. Robert Graves.

les-mythes-celtes---la-deesse-blanche

Le onzième arbre est le lierre à l’époque de sa floraison. Octobre était la saison des Bacchanales de Thrace et de Thessalie pendant lesquelles les Bassarides couraient comme des sauvages à travers les montagnes en agitant les branches de sapin de la reine Artémis (ou Ariadne). Les branches, mêlées à du lierre, à fruits jaunes, étaient disposées en spirales. Le lierre était employé en l’honneur de Dionysos, le Dionysos d’automne, qu’il faut distinguer du Dionysos du solstice d’hiver, lequel est, en réalité, un Héraclès. Ils s’étaient tatoué un chevreuil sur leurs bras droits au-dessus du coude. Dans leur fureur sacrée, ils mettaient en pièces faons, chevreaux, enfants, voire même des hommes. Le lierre était consacré à Osiris aussi bien qu’à Dionysos. Vigne et lierre se rejoignent à ce tournant de l’année et symbolisent ensemble la résurrection, sans doute parce que ce sont là les deux seuls végétaux du Beth-Luis-Nion qui poussent en spirales. Si la vigne symbolise la résurrection, c’est aussi parce que sa force est transmise par le vin. En Angleterre, les rameaux de lierre ont toujours servi d’enseignes aux débits de vin, d’où le proverbe : « bon vin se passe de lierre » et l’on brasse encore une bière de lierre, breuvage médiéval hautement toxique, au Trinity College d’Oxford en mémoire d’un étudiant de ce collège assassiné par les hommes de Balliol. Il est probable que la boisson des Bassarides était la bière de sapin, brassée à partir de la sève de l’épicéa et assaisonnée de lierre; à moins qu’ils ne mâchassent des feuilles de lierre pour leur effet de drogue. Cependant, le principal élément toxique de la drogue des Ménades a pu être l’amanita muscaria, le « tabouret de crapaud », champignon tacheté de points blancs qui seul peut fournir la force nécessaire. Ici nous devons reconsidérer Phoronée, le Dionysos du printemps, inventeur du feu. Il bâtit la cité d’Argos dont l’emblème, selon Apollodore, était un crapaud ; de même Mycène, la principale forteresse de l’Argolide, aurait été ainsi appelée, à en croire Pausanias, parce que Persée, un converti au culte de Dionysos, aurait trouvé un « tabouret de crapaud » poussant sur le site. Dionysos avait deux fêtes : au printemps, l’Anthestérion ou « Éclosion des Fleurs » et, à l’automne, le Mystérion qui signifie probablement « Éclosion des Champignons » (Mykostérion) auxquels on donnait encore le nom d’ambroisie (« nourriture des dieux »). Fut-ce Phoronée qui découvrit également un feu divin résidant dans ce champignon, ou bien fut-ce Phrynéus (« l’Être-Crapaud »)? L’amanita muscaria, bien qu’elle ne soit pas un arbre, pousse sous un arbre : toujours un bouleau dans le Nord, depuis la Thrace et les pays celtiques jusqu’au cercle arctique ; mais sous un sapin ou un pin dans le Sud de la Grèce ainsi que de la Palestine à l’équateur. Dans le Nord, elle est rouge ; dans le Sud elle est fauve. Et ceci n’expliquerait-il pas la préséance accordée à l’épicéa parmi les voyelles en tant que A et au bouleau parmi les consonnes en tant que B ? Cela pourrait-il apporter un supplément d’information au sujet de l’énigme sur le « Christ fils d’Alpha » ?

La rivalité entre le houx et le lierre, mentionnée dans les poèmes médiévaux, n’est pas, comme on pourrait le supposer, celle qui pourrait exister entre l’arbre du meurtre et celui de la résurrection, entre Typhon-Seth et Dionysos-Osiris ; nullement : elle symbolise la guerre domestique entre les sexes. L’explication semble en être que, dans certaines parties de l’Angleterre, la dernière gerbe de la moisson à être charriée dans une paroisse quelconque était liée avec le lierre osirien et appelée le Mai de la Moisson, la Fiancée de la Moisson ou la Fille du Lierre : c’était au dernier fermier à rentrer sa moisson qu’il incombait de donner la Fille du Lierre en pénalité, présage de mauvais sort jusqu’à l’année suivante. C’est ainsi que « lierre » en vint à signifier « mégère » ou épouse acariâtre : le lierre étrangle les arbres, ce qui confirme la comparaison. Mais le lierre et le houx étaient tous les deux associés aux saturnales, le houx étant la canne de Saturne, le lierre étant le nid du roitelet à cimier doré, son oiseau. Le matin de Noël, le dernier de son joyeux règne, le premier pied à franchir le seuil était censé être celui du représentant de Saturne, évoqué comme un homme sombre nommé le Gars du Houx, et l’on prenait de sérieuses précautions pour tenir les femmes hors de son passage. Ainsi donc la Fille du Lierre et le Gars du Houx en vinrent à s’opposer, ce qui donna naissance à la coutume de Noël selon laquelle les garçons du houx et les filles du lierre jouaient aux gages pour obtenir la préséance et chantaient des chansons, surtout satiriques, à l’adresse les uns des autres.

Le mois du lierre s’étend du 3o septembre au 27 octobre.

 

[Gort] L’ogham du lierre par Stephanie Woodfield

Extrait de « Celtic lore and spellcraft of the Dark Goddess – Invoking the Morrigan » de Stephanie Woodfield
Traduction et adaptation : Siduri

Signification divinatoire : briser les barrières. Persévérance et persistance.

Renversé : se sentir entravé, restrictions, dureté.

Le lierre est une plante particulièrement tenace. Il utilise plantes et arbres pour grimper jusqu’à la lumière du soleil. Malheureusement, sa présence persistante sur les arbres peut conduire à leur mort [ndlt : il semblerait que ce ne soit pas juste, un simple tour sur Wikipedia vous apprendra le contraire !] Dans une divination, un ogham du lierre inversé nous invite à lâcher prise. Il pourra aussi indiquer que des personnes ont une emprise néfaste sur notre vie ou essaye de nous contrôler. Le lierre est aussi associé à la protection. Le héros Fin Mac Cumhail se réfugie dans un arbre recouvert de lierre. On dit aussi que le lierre était sacré à la déesse de la lune et qu’il est porté pour garantir la fidélité en amour ainsi que pour attirer la chance.

Usages magiques : chance, pour dépasser les obstacles.

La Danse et le Chant de Pouvoir

Extrait du livre « Cœur de Chaman » par Arthur Sörensen.

Deux chamanes. Photo: Musée ethnologique de Vienne.
Deux chamanes. Photo: Musée ethnologique de Vienne.

Michael nous présente une technique utilisée par les Indiens pour trouver un « chant de pouvoir ». « Nous allons accomplir ensemble un rituel. Sept volontaires joueront du tambour avec moi ; nous marcherons en rond au centre du cercle. Vous resterez assis à écouter tout en cherchant un son, un sentiment ou un mouvement en vous-mêmes. Lorsque vous entendrez votre chant, vous le signalerez aux joueurs de tambour. Nous cesserons alors de jouer et vous aiderons à vous mettre debout. Nous écouterons votre chant pour l’apprendre et vous deonnerons des maracas, de façon à ce que vous puissiez en indiquer le rythme. Nous formerons une procession derrière vous, en suivant le tempo que vous nous aurez indiqué et en chantant avec vous. Certains ne trouveront pas leur chant. Ils resteront donc assis, tout en apportant leur soutien à ceux qui chantent. Ceux-ci, animés par leur danse, sentiront que leur pouvoir les emplit, ce que les autres pourront d’ailleurs voir et sentir. Lorsqu’ils auront dansé leur chant, ils donneront un peu de leur pouvoir à ceux qui, dans le cercle, en ont besoin. »

Pressés de commencer, nous mettons tout – coussins, couvertures et tambours – de côté.

« Huxley » est secoué par le rythme des tambours. Sept joueurs de tambour, conduits par Michael, tournent en rond, tandis que les autres restent assis à attendre, les yeux mi-clos. On dirait une procession funèbre du Moyen Age. Soudain, je remarque que quelqu’un se lève et chante tout en conduisant le groupe de joueurs. Au bout d’un moment il se rassied et un autre prend sa place. Ce manège dure un bon moment. Je me sens envahi par le doute : tout cela n’est-il pas absurde ? Rester assis là, à se laisser submerger par le son des tambours, les cris et le bruit… Je me demande dans quelle mesure cette expérience de chants spontanés est authentique.

Tout d’un coup, quasiment en réponse à mes doutes, j’entends une mélodie. Un son bref qui se répète tout au fond de moi. Je ressens une chaleur qui se répand dans ma poitrine, ainsi qu’un profond sentiment de paix et de joie. Je me lève, les jambes engourdies d’être resté assis aussi longtemps. Les joueurs de tambour me voient et viennent vers moi. Ils me mettent des maracas dans la main droite ; je les secoue avec force. Un véritable sentiment de liberté envahit ma poitrine tandis que je chante ma mélodie aux joueurs. Je danse à l’intérieur du cercle et les tambours résonnent. Moitié dansant, moitié courant, je chante. Tout d’un coup la mélodie en moi se tait et je m’arrête, suant et tremblant. Hébété, je regagne ma place dans le cercle.

Michael nous demande, à Judy et à moi, de charger de pouvoir l’un des tambours en le tenant entre nos mains tendues. Judy aussi a dansé son chant. Le tambour est maintenant devenu un puissant outil de guérison. Je le sens se diriger lui-même vers l’endroit où on a besoin de lui, d’abord chez Jim, puis chez Richard et enfin chez Paul.

Lorsque Judy et moi avons fini de faire circuler le tambour, tous trois parlent de ce qu’ils ont ressenti. Le silence envahit la pièce, comme si tous ensemble nous avions créé une cathédrale. Lentement les gens se lèvent, titubant dans la nuit, plongés dans leurs réflexions.

Je m’assieds dans un coin de la salle à manger, loin des conversations et des discussions, pour boire un bol de thé chaud à la menthe. Je cherche à comprendre les expériences de la soirée.

Michael vient vers moi, une tasse de café et un morceau de gâteau à la main. Nous parlons des Samoyèdes. Il est convaincu que ce peuple possède, de tout le continent européen, la plus ancienne connaissance des rituels chamaniques et qu’ils se battent pour conserver leurs traditions vivantes. Il dit que certains Samoyèdes ont encore leurs tambours, les runebommers, comme ils les appellent, et qui sont de deux types : l’un est un tronçon d’arbre évidé, avec une peau de renne tendue par dessus, l’autre, plus courant, comporte un cadre fin et arrondi. Ces tambours sont généralement de forme ovale et leur peau est ornée de thèmes mythologiques.

Michael va se coucher et je sors sur la terrasse. Un couple assis me regarde. Je sais qu’ils brûlent de curiosité et voudraient bien savoir ce que fait le groupe chamanique. Mais je ne me sens pas capable de parler avec eux. Encore agité, je m’assieds près du feu, pour laisser les braises rougeoyantes, qui s’éteignent peu à peu, calmer mon cœur et mon esprit.

Chasser un chant de pouvoir

sami drumExtrait du livre La Voie du Chamane par Michael Harner.

Avant d’entreprendre le voyage chamanique pour recouvrer un animal de pouvoir, vous devriez posséder un chant de pouvoir. Chaque chamane dispose d’au moins un chant qu’il utilise pour réveiller son gardien et ses autres alliés afin qu’ils l’aident dans les soins et d’autres pratiques. Pour acquérir un chant de pouvoir, prévoyez de passer une journée seul dans un lieu sauvage, où vous ne rencontrerez personne et où l’environnement naturel n’a pas été trop modifié par les humains. Rasmussen, le grand spécialiste de la vie inuit, explique cela très bien :

 […] Les meilleures paroles magiques sont celles qui viennent lorsque l’on est seul dans les montagnes. Ce sont toujours les plus puissantes dans leurs effets. Le pouvoir de la solitude est grand et au-delà de l’entendement.

Une zone forestière ou montagneuse isolée est l’endroit idéal, mais si vous ne pouvez atteindre un tel lieu, essayez de faire pour le mieux. Ne prenez pas de petit-déjeuner et jeûnez toute la journée alors que vous vous baladez calmement en vous asseyant parfois. Ne planifiez aucun itinéraire ; regardez simplement où vos pieds vous mènent. Alors que vous vous promenez, découvrez quel animal vous vous sentez être. Cela peut être ou non celui que vous avez dansé. Incorporez ses sensations et prenez plaisir à endosser son identité durant la journée.

Comme il s’agit de votre première chasse au chant, il est possible que vous ne trouviez que la mélodie. Si c’est le cas, il vous faudra plus tard également trouver vos propres paroles. Mais pour l’instant, je vous donne les paroles de l’un des chants que j’ai acquis alors que j’étudiais avec les Jivaro :

J’ai des esprits.
Des esprits m’ont.
J’ai des esprits.
Des esprits m’ont.
J’ai des esprits.
Des esprits m’ont.
Moi, Moi, Moi.
(Répétez trois fois encore et passez à la strophe suivante.)
Mes esprits
Sont comme des oiseaux,
Et les ailes
Et les corps sont des rêves.
J’ai des esprits,
Des esprits m’ont.
Moi, Moi, Moi.
(Répétez trois fois encore et revenez à la première
strophe.)

Répétez le chant aussi longtemps que vous sentez que cela est nécessaire. Un chant de pouvoir facilite l’entrée en ECC (état de conscience chamanique), tant par ses paroles que par sa mélodie. Plus vous utiliserez le chant durant le travail chamanique, plus il constituera une aide efficace dans la modification de votre état de conscience. Finalement, il agira comme une légère détente qui vous aidera à passer en ECC.

 On peut également rechercher un chant de pouvoir spécifique qui est chanté pendant le voyage. Il vaut mieux le découvrir durant le voyage lui-même, et il comporte généralement une description de ce que l’on voit. Cette libre adaptation par Cloutier du chant d’un chamane tsimshian de la côte nord-ouest des États-Unis en constitue un bon exemple :

Je vais dans mon canoë partout
dans ma vision
Au-dessus des arbres ou dans l’eau je flotte
Tout autour je flotte
parmi les tourbillons
Tout autour je flotte
parmi les ombres
Je vais dans mon canoë partout
dans ma vision
Au-dessus des arbres ou dans l’eau je flotte
à qui est ce canoë dans lequel je me tiens
Celui dans lequel je me tiens avec un inconnu
Je vais dans mon canoë partout
dans ma vision
Au-dessus des arbres ou dans l’eau je flotte.

Suite du texte ici.

Chant de Pouvoir reçu pendant un rêve

Extrait du livre La Voie du Chamane par Michael Harner.

essieparrish
Essie Pinola Parrish (1902–1979), was the last Kashaya Pomo spiritual leader and an expert basketweaver

Vous pouvez également acquérir involontairement un chant alors que vous rêvez. Feue Essie Parrish, une chamane indienne pomo de Californie, rapporta le rêve de son premier chant de pouvoir : « Je vais vous raconter une autre histoire de ma jeunesse – comment j’ai chanté un chant pour la première fois lorsque j’étais enfant. J’avais onze ans à cette époque. Je n’ai pas acquis ce chant d’une manière ordinaire – je l’ai rêvé. Un jour, alors que j’étais endormie, un rêve vint à moi -j’entendis chanter là-haut dans le ciel. Parce que j’étais petite, parce que je ne comprenais pas de quoi  il s’agissait, je n’y prêtai pas [consciemment] attention – j’écoutai [passivement] cet homme chanter là-haut. Toutefois, il fit en sorte que je l’apprenne – c’était comme s’il entrait profondément dans ma poitrine, comme si le chant lui-même chantait dans mon larynx. Puis, il me sembla que je pouvais voir l’homme, comme si je pouvais le distinguer.

 Après mon réveil, ce chant chanta en moi toute la journée. Même si je ne voulais pas chanter, le chant chantait dans mon larynx. Puis j’essayai moi-même de chanter, et j’essayai encore, et, à ma grande surprise, le chant était magnifique. Je m’en suis toujours souvenu depuis.

Puis, une fois, ma sœur aînée et moi accompagnâmes notre grand-mère à Danakâ. À l’époque, ma sœur était jeune aussi, mais elle était plus âgée que moi. Nous voyageâmes avec elle [notre grand-mère]. Arrivées à Danaka, nous nous y établîmes.

Puis, un matin, très tôt, nous allâmes à Madrone Beach chercher des algues. Nous accompagnâmes notre grand-mère. Alors que nous étions assises là sur un gros rocher, nous jouions à la poupée, riant et bavardant. Mais ce chant chantait toujours au plus profond de moi. Alors, comme il chantait dans mon larynx, je commençai aussi à chanter. Il se trouva que ma sœur m’entendit.

« Que chantes-tu ? », demanda-t-elle. « Je chante un chant », répondis-je. « Qu’il est beau. Où as-tu entendu ce chant ? », interrogea-t-elle. « Je l’ai rêvé », répliquai-je. Lorsque je dis cela, je me sentis embarrassée. « S’il te plaît, chante-le encore. » Alors, je recommençai. « Oh, qu’il est beau ! Apprends-le moi ! », dit-elle. Je répondis : « Il n’est pas fait pour ça. Tu ne peux pas l’apprendre. » Puis, comme elle était plus grande que moi, elle parvint à me faire chanter. Même si je ne voulais pas, elle y parvint tout de même.

Alors je chantai le chant…

« Mais ne le dis à personne », lui dis-je. « Pourquoi ? », demanda-t-elle. « Ils pourraient me faire chanter. » « D’accord », dit-elle. Mais elle ne tint pas parole. Nous retournâmes à la maison le soir. Ma sœur, en dépit de [ce qu’elle avait promis], raconta tout au frère aîné de la mère de ma mère – un homme étrange, un peu fou. Il me dit : « Ils disent que tu as un chant. » « Eh bien, qui dit cela ? », demandai-je. « Ta sœur aînée a dit que tu chantais un chant merveilleux. Chante-le, s’il te plaît », dit-il. Alors, je chantai encore pour lui. Cela lui plut beaucoup.

Ce fut le premier chant que j’ai chanté lorsque j’étais petite.

Je vais m’arrêter là. »